Les Cœurs insolents
7.4
Les Cœurs insolents

Roman graphique de Ovidie et Audrey Lainé (2021)

Ovidie c'est vraiment une meuf qui fait le taf niveau féminisme. Elle aborde la lutte sous tout un tas d'angles et tout un tas de formats.


Et ici le propos est surtout de nous rappeler un truc simple qu'on sait depuis Germinal : les choses avancent. Doucement mais elles avancent. Et que c'est un recul qu'on a tendance à oublier quand on est le nez dans la lutte.


Mais tout ça n'est aussi que prétexte à faire un bilan des comptes. Comment ça s'est passé entre deux générations ? En mieux ? En moins bien ?


Et surtout, là où brille la BD c'est que, comme Ovidie le fait souvent dans ses oeuvres, c'est aussi le bilan de sa propre vie, donnant une touche essentiellement naturaliste. On mélange l'idée abstraite du féminisme avec des situations concrètes, des moments de la vie de tous les jours. Ce quotidien s'élève pour comprendre les mécanismes systémiques qui sont en jeu et en même temps cette théorie s'incarne matériellement pour devenir crédible et intelligible.


Ca change des BDs-concepts qui veulent mettre en avant un sujet (Carnet de Santé Foireuse, La Différence Invisible, Tant pis pour l'Amour...) et qui paraissent plus informatives voire moralisatrices qu'autre chose. Les Coeurs Insolents c'est plein de vie, c'est une contemplation du réel.


Il y a pas mal de bonnes idées de mise en scène, surtout pour représenter ces parties plus abstraites et théoriques (je retiens particulièrement cette grande case qui représente le patriarcat comme un ensemble de bras qui poussent, tirent, valident et invalident les comportements de deux enfants). Là encore des scènes quotidiennes sont des allégories qui résument un concept ou une idée.


Si certains moments m'ont bien remué les tripes, je suis moins fan de certaines lourdeurs, la BD a tendance à me rapeller des trucs qui me semblent évident. Ca sent un peu le truc qui a été lissé pour rendre la BD accessible au plus grand nombre, même aux personnes ceinture blanche en féminisme. Ca lui enlève du caractère.

Le côté BD-concept dont je parle plus haut est tout de même encore un peu là. On a parfois l'impression de lire un manuel d'histoire des années 90 plutôt qu'une oeuvre d'art. Trop descriptif.


Il n'empêche que ça me donne envie de continuer à creuser les oeuvres d'Ovidie qui arrive particulièrement bien à tailler le matériau de sa vie pour en faire des perles.

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il y a 4 jours

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