Dans la peau de l'ours
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Auteur complet, Mathieu Sapin touche aussi bien le stylo que le pinceau. Pour cette petite escapade dans le domaine « jeunesse », il a fait appel à son compère dessinateur Patrick Pion, avec qui il a déjà signé plusieurs projets (« La Planète aux cauchemars », « Mégaron » et « Les Rêves dans la maison de la sorcière »). Car lorsque Sapin dessine, il privilégie davantage les documentaires sur la vie politique (« Comédie française », « Le Château »…)
Avec « Lombric », les deux auteurs nous proposent un récit poétique un peu hybride, où trois univers vont se rencontrer sans jamais vraiment communiquer, ou alors pas forcément pour le meilleur… L’histoire démarre comme un conte animalier au charme victorien, où l’on verra entrer en scène dans sa vieille guimbarde un crapaud détective venu enquêter sur de mystérieux assassinats commis dans la forêt environnante. Des gerboises et autres ragondins sont massacrés impitoyablement, et l’on ignore qui est le dangereux criminel. La scène suivante nous permet de faire connaissance avec la petite créature illustrant la couverture, sorte de yôkai débarquant de nulle part. Cet être solitaire et silencieux, aussi mignon que flippant, se verra confronté aux mille dangers d’une nature magnifique mais sans pitié. Et pourtant, c’est l’irruption du monde des humains qui restera la plus effrayante, mais à ce stade, impossible d’en dire plus afin de ne pas trop spoiler le récit.
« Lombric », c’est un peu la rencontre de la BD franco-belge avec le manga japonais inspiré de Miyazaki. La première, avec ses animaux anthropomorphes et cette tendance à reproduire un monde enfantin idéalisé, et la seconde, plus en phase avec la réalité pour évoquer une nature amorale, à la fois merveilleuse et terrifiante, où la cruauté joue à part égale avec l’innocence, à l’image de ce minuscule yôkai. A l’opposé se trouve la société humaine et ses sous-produits névrosés, incarnée par cet enfant sadique et attardé, constituant une menace permanente pour l’harmonie et la beauté du monde pré-civilisationnel.
Malgré son côté inabouti, le dessin de Patrick Pion ne manque pas de charme, même si on peut regretter les tonalités de couleurs diluées sous un voile uniforme un peu sombre, qui néanmoins reflètent d’une certaine manière le propos doux-amer.
Cette bande dessinée quasi-muette, qui par conséquent se lit très vite, s’avère avant tout une ode à la nature, où la poésie est bel et bien présente, en plus d’un humour fugace et souvent déconcertant. Une fois de plus, le livre bénéficie d’un très joli travail éditorial comme seule la collection Métamorphose sait le faire.
Créée
le 17 févr. 2023
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