Remender poursuit son run sur Captain. Après sa première longue saga qui nous a emmené dix années fictives durant au côté de Steve Rogers, le retour sur la bonne vieille Terre 616 se montre difficile pour notre héros. En aucun cas pour son scénariste qui continue de briller dans ses séries Marvel Now.
Tout l'aspect psychologique est parfait avec un héros fatigué, usé par les événements traumatisants du dernier tome, qui avance comme il peut dans sa vie, soutenu par ses proches. L'occasion d'apprécier Jet dans un cadre plus serein et de redécouvrir son célèbre sidekick aka le faucon.
Pour autant, Remender ne se repose pas sur ses lauriers (le premier arc était très bon dans sa seconde partie) et attaque d'entrée de nouvelles intrigues. Il introduit le clou de fer, méchant d'origine chinoise à l'idéologie anti-américaine. Directement, il lui donne un background intéressant en tant qu'ancien agent du Shield, ce qui enlève toute trace de manichéisme. Au contraire Remender se montre soucieux quant aux motivions de ses personnages, aucun n'ayant totalement tort ou raison. L'Amérique est un pays des plus complexe de par son rôle sur la scène internationale. Différents aspects sont développés dans ce comics (interventionnisme, protecteur du monde, unilatéralisme, anti-communisme, débat sur les libertés). Un des personnages clés dans cette pièce de théâtre qu'il met en scène se nomme Nuke. Remender réutilise à merveille le super-soldat, l'étoffant enfin, lui donnant des motivations et des vrais dialogues. On retrouve avec lui une Amérique pro-militariste qui s'est sentie trahie par la perte d'influence (retrait du Vietnam si on remonte, d'Irak très récemment) et la difficulté de réintégration des soldats dans la société. Lui et Captain America, deux symboles des USA, deux drapeaux face à face dans un pays d'Europe, dans la neige d'une ville, dans le combat et la destruction. C'est non seulement intéressant mais aussi puissant en image et en intensité, les combats étant vraiment bien dessinés.
Je noterai de plus que Remender use de Nuke à bon escient tout en respectant sa continuité, que ce soit la caractérisation et les grands traits du personnage sous Miller ou l'intégration au projet arme plus depuis Morrison (projet dont une annexe a ici son importance).
Je tiens par ailleurs à signaler une scène assez anecdotique mais qui montre cependant la maîtrise du scénariste. Il s'agit de la tentative d'évasion d'un banquier chinois des camps de travail du clou de fer. On y retrouve un vrai suspense, une narration immersive, un dialogue méticuleux et un attachement au personnage inconnu que l'on découvre à peine. Et en plus le lecteur en apprend un peu plus sur le clou de fer. Chapeau bas.
Encore une fois Remender me bluffe par sa capacité à faire ressortir l'essence des personnages pour servir son propos. Il vise juste et produit des très bons comics, mêlant à merveille l'action et les points de passage obligé des super-héros avec ses idées et son point de vue.