Cette BD est géniale.
Le concept de base, déjà, m'a immédiatement accroché et fasciné. On a un royaume où la famille royale est géante, avec des humains comme serviteurs et surtout comme nourriture. En outre, les géants sont de plusieurs dimensions, ceux des générations les plus anciennes étant vraiment gargantuesques, taille Godzilla, là où les plus petits ne font que deux à trois fois notre taille. J'adore tout ce jeu de proportions, qui influe aussi sur les décors du château, où on passe en permanence entre des choses toutes petites et des éléments énormes. C'est vraiment démentiel, ça donne des visuels absolument magnifiques. Surtout que tout le château est en architecture gothique du moyen-âge, avec des colonnades, des voutes en ogives, des vitraux dans tous les sens... C'est époustouflant.
Et puis il y a ce trait bien noir, détaillé et précis qui a toujours un petit côté glauque et malsain et qui fait tout le charme du dessin de Gatignol et qu'on apercevait par moment dans Pistouvi. Ici il s'en donne à cœur joie, avec de grosses masses de noirs, une bonne utilisation des gris, des géants consanguins bien dégueulasses qui mangent des humains... Et l'on retrouve les fameux gros plans en « grand angle » pour les moments importants, et ils sont toujours aussi efficaces.
L'histoire est passionnante avec ce monde complètement bizarre et fascinant, où certains humains sont élevés comme du bétail par d'autres hommes pour nourrir la famille royale consanguine et dégénérée, arriérée, et obsédée par la grandeur qu'elle avait autrefois (autant physiquement que symboliquement). On voit ces géants revendiquer leur cruauté et leur bêtise comme un atout, pester devant la dégénérescence de leur famille mais ils ne peuvent se résoudre à s'accoupler avec ce qu'ils mangent... Ca semble être le crépuscule de leur lignée et puis il y a Petit, le dernier-né de ces ogres, à peine plus grand qu'un homme. Est-il le salut, comme l'imagine sa mère, capable de s'accoupler avec une humaine pour donner naissance à une nouvelle génération de géant sains, ou est-il le symbole évident de la fin d'une époque ?
Il est élevé en secret par sa grande-tante gargantuesque qui est amoureuse de la culture humaine qui veux qu'il vive comme un humain normal. Mais il est aussi élevé aussi par sa mère qui veux en faire un digne héritier de sa famille. On a donc un enfant partagé entre ses aspirations humaines et ogres, son instinct parfois dégénéré reprend parfois le dessus, mais d'autres fois c'est la haine de sa famille... Il y a aussi ses amours compliqués avec les humaines, qu'il ne peut enfanter par peur de les voir mourir à cause de bébés monstrueusement grands, comme c'est trop de fois arrivés par le passé de leur famille...
Cette BD est absolument géniale. Le concept de base est fou, le dessin est somptueux, le scénario intelligent, en plus c'est malin dans la mise en page avec les interludes textuels qui font l'historique de la famille entre deux chapitres de la BD, et l'album en lui-même est un très bel objet. Bref, excellente surprise pour ma part et je recommande cette BD très chaudement.