Critique de Stéphane de AAAPOUM pour les Inrockuptibles
Un superhéros meurt : qui l’a tué ? Le point de départ de chaque Powers est classique, coup de théâtre symbolique mainte et mainte fois rebattu depuis sa première et retentissante mise en scène dans Watchmen (l'œuvre culte d’Alan Moore). Pourtant, il ne faudrait pas classer Powers dans cette catégorie de comics métaphysiques. En effet, chose rare en cette époque, la série ne cherche jamais la démythification, moins encore le pamphlet politique. Chez Michael Brian Bendis, seules les relations humaines prévalent. Le reste n’est que prétexte, où matière, à nourrir les tensions et psychologies complexes de ses personnages.
Superhéros déchu, dont les pouvoirs ont disparu brusquement, le protagoniste principal se présente comme une ancienne légende de la justice reconvertie en inspecteur de police. Chacune de ses aventures, sur fond de polar, est l’occasion de renouer avec ses anciens compagnons, son ancienne vie. Mais ces retrouvailles, inévitablement macabres, tissent lentement une relation destructrice, mêlée de nostalgie et de frustration, qui réveille en toile de fond le mystère de sa déchéance : comment a-t-il perdu ses pouvoirs ? Powers, outre ses indéniables qualités d’écriture et de mise en scène, mérite d’être découvert car il illustre un genre finalement peu courant : celui des récits d’aventures à l’ancienne qui savent parfaitement jouer avec les constructions thématiques et narratives de ces dernières années.