Cyril Bonin s’est spécialisé dans la romance. De préférence avec un léger côté SF/fantastique comme le montrait « The time before » ou « Amorostasia ». C’est le cas également de « Presque maintenant » qui nous présente en couverture un trio amoureux entouré de données médicales. Et si on pouvait prédire son espérance de vie en continu ? Qu’en ferait-on ? Voilà le sujet du bouquin.
Félix, Anna et Alexis se rencontrent pendant leurs études. L’un est en fac de biologie, l’autre musicienne, le dernier en lettres. Ils vont former un trio à l’amitié solide avant qu’un couple finisse immanquablement par se former. C’est Félix, le biologiste, qui va conquérir le cœur de la belle. Parce qu’il a été le premier à se lancer ?
Au-delà du trio amoureux sans grand intérêt, Cyril Bonin développe avant tout un concept d’application pour smartphone où l’on pourrait suivre en permanence son espérance de vie. Faites un repas gras, perdez 10 jours d’espérance de vie et vous y réfléchirez à deux fois avant d’y retourner… Voilà l’idée. Hélas, le bouquin ne va pas beaucoup plus loin. On assiste à une descente aux Enfers de Félix pendant qu’Anna tente de s’extraire de tout ça. Au final, l’ouvrage est extrêmement moralisateur sur les applications qui nous suivent en permanence, mais surtout sur son discours « mieux vaut vivre moins longtemps mais profiter de la vie ». Ce livre est pleinement dans l’air du temps, une réponse à l’omniprésence des téléphones qui nous observent et aux idéologies vegan et sans gluten qui sévissent. Mais le traitement est trop superficiel et caricatural pour se révéler intéressant.
« Presque maintenant » semble contenir deux histoires séparées. La partie « couple » avec l’application biologique et la partie « trio ». En effet, Alexis disparaît pendant une bonne partie de l’ouvrage… Il en découle un problème évident de narration et de rythme. Ainsi, l’application apparaît bien tard dans l’ouvrage.
Si je lis Cyril Bonin, c’est avant tout pour son dessin (et parce que j’avais aimé « Amorostasia »). J’avoue que ce dernier me plait de moins en moins. Certes, son trait est reconnaissable mais le choix des couleurs pastels manque de contraste et la bande-dessinée apparaît très terne. Il abuse également des gros plans. Son livre étant basé presque uniquement sur des gens parlant dans un appartement, il peine à renouveler ses compositions. Les bulles de dialogue étant nombreuses et bavardes, elles donnent une impression d’oppression dans les cases.
« Presque maintenant » m’a laissé dubitatif. Il y a une idée derrière le scénario, mais elle est traitée trop superficiellement et polluée par un trio sentimental sans intérêt. Quant au dessin, le point fort de Cyril Bonin, il manque de variété et d’inventivité pour compenser le reste.