Brian Azzarello est un scénariste que j'apprécie tout particulièrement pour sa vision singulière des héros, souvent cynique, avec des psychologies extrêmement fouillés. Et pourtant, en 2004/2005, il s'attaquait au héros lumineux et positif par excellente : Superman. Sur son run de 12 numéros, succédant au très plaisant GodFall magnifié par Turner, il se voit accompagner de Jim Lee au dessin.
For Tomorrow est un arc de prime abord mystérieux. On se croirait débarquer dans un elseworld au niveau du premier épisode. Progressivement, l'histoire se dégage et la situation s'éclaire. La première moitié vaut vraiment le coup. On nous présente un Superman à l'allure divine, pourtant usé, à bout. Via son dialogue avec un prêtre, il cherche tantôt une paix intérieur, tantôt un regard extérieur sur la situation qui le taraude.
Le récit en flashback, sympathique à ses débuts, finit par s'embourber dans la répétition. Trop prévisible, on y retrouve un héros piégé au milieu d'un pays en pleine guerre civile, se retrouvant à combattre un monstre tout droit sorti des années 90 au niveau design (et même profondeur, très décevant pour un vilain à priori inventé par Azzarello).
Pourtant, l'aspect géopolitique mêlé à cette arme puissante quoique aléatoire, capable de faire disparaître un million d'humains de la surface de la Terre, avait tendance à me plaire. Seulement, la seconde partie du récit, ou plutôt son dernier tiers - soyons clément - sombre un peu. On retrouve du Zod, une bataille frontale, on renoue avec la surexploitée zone fantôme, et on oublie le mélancolisme qui prédominait au début de l'arc.
Tout n'est pas non plus à jeter dans cette seconde partie. Le récit y tend à s'inscrire dans la continuité DC. On ressent l'influence de Birthrigth au niveau de la vision des parents El, on retrouve un Batman très bien écrit dans un dialogue - mené d'une main de maître - entre les deux piliers DC, une Wonder Woman superbe sous le crayon de Lee, quoique ces deux personnages se voient totalement sous-exploités.
Graphiquement, Lee n'est une nouvelle fois pas à la hauteur de sa réputation (à mon sens surestimée). C'est beau mais pas impressionnant, et passé les planches messianiques de Superman dans la cathédrale, et sa très belle Diana, on reste sur sa faim. Son style résonnait encore trop à l'époque des années 90 / début 2000.
For Tomorrow est un bon ouvrage à lire en médiathèque, car du mainstream avec un vrai angle d'attaque sur un héros iconique, mais je ne l'achèterai pas en grande partie pour sa conclusion décevante.