Pour ceux et celles qui ne connaitraient pas le gus :
https://www.youtube.com/watch?v=dlgBeiLgz40
Bref ! beaucoup est dit dans cette vidéo.
The promised Neverland est une sorte d'ovni du Shonen (avec certains passages quand même clairement orientés pour adolescents ou adultes), précurseur, jonglant avec finesse entre l'action, l'horreur, le psychologique, l'humour, le suspense... l'alternance est réussie avec brio, et fluidité. BON SANG que ca fait du bien, un shonen-seinen (on arrive à la croisée entre les genres, un peu comme dans un fullmetal alchimist, avec un positionnement difficile sur cet axe...) ou il n'y a pas d'histoire d'amour, qui prennent souvent beaucoup de place dans l'intrigue, pour un rendu fade, cassant le rythme d'une histoire, pour absolument "caser" cette sacro sainte idylle amoureuse... Ici, on a une amitié forte, mais rien qui ressemble de près ou de loin à un couple, laissant pleine place à l'intrigue, au développement des personnages, au suspense... et c'est heureux. Et Neverland ne se lance pas dans ce terrain aventureux des histoires amoureuses, pour cause, ici, les héros sont des enfants, et le monde dans lequel ils vivent ne laisse pas beaucoup de place au batifolage... Que du très bon, un manga intelligent, atypique, haletant... Je ne vois pas beaucoup de points négatifs, en fait ! Je trouve qu'on sent, souvent, à travers certaines oeuvres, la considération ou la vision qu'a l'auteur de ses futurs lecteurs. Ici, c'est bingo, je trouve l'oeuvre tout à fait honnête, gardant sa ligne directrice, et ne cherchant jamais la facilité... et bon sang que c'est bon ! Un manga qui cherche à transmettre de bonnes valeurs (écologie, entraide, rédemption...) sans tomber dans le poncif lourd et moralisateur, juste avec quelques allusions qui s'intègrent parfaitement dans l'intrigue... Et surtout, chose très rare il faut l'avouer, une valorisation, non pas de la force physique, de l'héroisme, mais bien de la réflexion, du recul à prendre.
Les personnages principaux ont chacun leur vision des choses, et cela inaugure peut être un conflit futur dans le trio (?) mais... de nombreux passages, ou les personnages se retrouvent en danger, prennent du recul, et parviennent à trouver des solutions... est formidablement bien mis en oeuvre, et reste crédible, et rend le face à face "humains contre démons", malgré le rapport de force largement inégal, palpitant au possible. De plus, on apprend à mieux connaître les démons, qui, même, si ils semblent constituer une menace, ne sont pas "une masse uniforme" comme peuvent l'être beaucoup d'ennemis dans le domaine de la SF, sans nuance ni subtilité. Les démons peuvent être sauvages, instruits, hostiles, voire même amicaux. En fait... eux aussi possèdent une logique et des paradoxes, comme les humains. Pas de manichéisme ici, une rare puissance de récit et réflexion, réellement intéressante, qui rappellerait par certains aspects Tokyo Ghoul
Souvent comparé à Death Note, le manga évite la "surrintellectualisation" poussive et lourde de ce dernier, qui lui donnait, je trouve, un côté élitiste et prétentieux... et se révèle, aussi, beaucoup moins binaire. (attention, les débuts de Death Note sont passionnants, mais de nombreux défauts finissent par apparaitre au fur et à mesure). Bref, les bons côtés de DN, sans les mauvais. Que du bon, vraiment.
Sans oublier les futures pistes que laissent présager les auteurs du manga et qui s'avèrent passionnantes
L'exfiltration des orphelins restant du Gracefield House, les autres fermes "premium" et leurs éventuels évadés, la traversée de la frontière du monde entre les humains et les démons, les retrouvailles probables avec Norman qui a du évoluer de façon bien différente de son côté (voyons, qui pense encore que Norman n'a pas pu s'en tirer ? mais surtout, qu'a t-il vu avant de quitter l'orphelinat ???), le bouleversement du système voire les solutions proposées pour la cohabitation humains/démons...
Après un tournant assez décisif dans le cours de l'histoire dans à partir du chapitre 37... le manga continue a tenir la route et ses promesses. La tension oppressante du début évolue vers une autre ambiance, cependant... tout s'enchaîne de façon fluide et crédible. Très optimiste pour la suite.
Etant actuellement assez loin dans l'histoire, les craintes que j'avais, c'est à dire que le manga finisse par trop épargner ses lecteurs en proposant des deus ex machina pour sauver constamment les enfants... les auteurs décident de sacrifier des enfants, sans rentrer dans le gore ou l'outrancier (parfaitement maitrisés jusque là), mais pour rester "crédible", tant les menaces qui pèsent sur nos héros sont lourdes. C'était ma principale crainte pour la suite, mais le chapitre 68, avec la mort brutale et impitoyable d'enfants durant la chasse me conforte : ce manga EST un chef d'oeuvre, avec des auteurs résolus à ne pas laisser leur manga devenir trop "confortable" (coucou naruto, avec toutes les résurrections improbables à la pelle !). Bref, on ne voyait pas beaucoup de morts d'enfants jusque là (à part celle de Conny, et celles suggérées des autres orphelins de la base B06-32) mais on se rend bien compte que la menace qui plane sur eux reste toujours concrète et crédible, et que les auteurs n'en font heureusement pas des personnages intouchables, la mort continuant à roder autour d'eux. Je vais passer pour un sadique, mais les morts d'enfants arrivent "à point", la menace des démons devant rester crédible et constante, ligne directive du manga, et voir Emma réussir à sauver tous les enfants durant la chasse alors que des pertes étaient obligatoires, m'aurait fortement déplu, tant je tiens ce manga en haute estime et que mes exigences sont grandes. C'est la force de ce manga : alors que le zigouillage de personnages à la pelle en mode "survivalisme" est une déplaisante mode dans le manga (lorsqu'il n'y a aucune nuance et que le gore est le seul but) The Promised Neverland choisit de faire planer une menace constante, oppressante, avec une horreur suggérée, rare mais dévastatrice, jamais gratuite, et aux nombreuses conséquences. On sent un énorme respect de la vie humaine, et de ses personnages, dont la mort n'est que plus poignante.
Je ne taris pas d'éloges sur cet excellent manga, et espère vous convaincre de foncer le lire. Addictif dès la fin du premier chapitre !
[Edit] : quel dommage. Au fur et à mesure de la lecture, la qualité fini fatalement par baisser.
Les démons perdent leur aspect terrifiant, les enfants deviennent surpuissants, et les armes à feu qu'ils utilisent à outrance (sérieusement ? Des gamins de 12 ans qui manient des mitrailleuses lourdes ?) inversent complètement le rapport de force. Les premiers arcs sont juste sensationnels, vraiment. La suite... est dispensable. Dommage, on frolait le chef d'oeuvre.
PS : le manga s'est terminé, et malheureusement, la qualité est en baisse, de façon légère, mais constante, dès la fin de l'arc du parc d'attraction.
L'auteure tombe dans la facilité, les raccourcis, c'est un tel dommage, le changement d'ambiance n'est pas toujours réussis, les premiers arcs laissaient présager un véritable chef d'oeuvre, quel dommage malgré tout...