Les titres de l'univers Ultimate avaient pour objectifs d'attirer les nouveaux lecteurs à l'heure où le genre héroïque faisait ses premières armes au cinéma. En vérité ils ont principalement permis un nouvel angle d'attaque pour des auteurs prometteurs et une modernisation aux yeux des anciens lecteurs. Le travail de Millar sur les franchises avengers et mutantes demeure le meilleur exemple de cette ligne éditoriale. Concernant DD, le pari fut le même sans toutefois lui laissé l'honneur d'une série régulière. Qu'à cela ne tienne Greg Rucka prendra l'histoire par l'autre bout : Elektra.
Miller était un novateur dans les années 80, son Hell's Kitchen sonne toujours moderne à notre époque et Netflix l'a adapté sans peur. Aussi il n'y avait que peu de choses à dépoussiérer dans le couple qu'il avait créé. Et ces quelques éléments sont intelligemment modifiés. Ainsi on enlève les ninjas, Elektra a certes appris les arts martiaux auprès de Stone, mais dans un dojo et sur un tatamis comme tout le monde ! On enlève également le cliché de la riche bourgeoise au père industriel, Matt tombe amoureuse d'une New-yorkaise étudiante au père immigré qui tient sa petite affaire de pressing. On enlève le principe de mal inné et intérieur, de la folie qui la hante et de ces voies qui la pousse au meurtre comme dans The Man Without Fear (j'adore cette vision de Miller toutefois elle empêche indubitablement une approche réaliste, maître mot de l'univers Ultimate à la base). Comble de l'aventure, on enlève le principe même de super-vilain, se contentant d'un simple violeur. Sauf que le comics, lui, n'en est pas pour autant simple.
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L'ampleur du viol et l'impact destructeur qu'il implique sur la victime n'est en aucun cas diminué. On adhère parfaitement à la colère qui habite Elektra devant la vision de son amie dépouillé de sa dignité et de son intégrité physique comme mentale, on comprend cette flamme qui s'embrase dans son être devant l'impunité du coupable. De péripéties en péripéties, l'héroïne emprunte la pente glissante pour mettre un terme aux crimes et attaques de toutes sortes quelles subies, alors même que de l'autre côté, son petit ami tente tout pour la retenir. Le climax sera atteint dans le parc de NY, alors qu'Elektra s'apprête à commettre l'irréparable. Se sentant trahi et abandonné par un Matt qui lui a menti sur sa cécité, elle le confronte à un choix décisif, un dilemme cornélien : la suivre et continuer leur idylle, ou sauver un criminel hors de porté du système en l'emmenant à l'hôpital. Pour le héros que nous connaissons, pour le futur démon de Hell's Kitchen, ce choix n'en est pas un. Il n'y avait qu'une conclusion possible au récit. Elle se révèle dur, sans pitié sur sa vision des deux amants maudits et sur cette chienne de vie qui les sépare. Entre la justice et la passion, nul n'échappe à la douleur.