Une beauté improbable qui se révèle tardivement
300 000 personnes évacuées, 600 000 « liquidateurs » sacrifiés, un nombre incalculable de personnes contaminées (on a tous vu ces effroyables photos d’enfants difformes), un coût de 1000 milliards de dollars… Tchernobyl est sans conteste la plus importante catastrophe nucléaire de tous les temps. Ses conséquences humaines, écologiques, financières ou matérielles sont immenses.
C’est pour ces raisons qu’Emmanuel Lepage et un collectif d’artistes militants se rendent en 2008 dans la région du drame ; ils veulent dénoncer l’horreur nucléaire, rendre compte du désastre. Et dans la majeure partie du reportage, l’atmosphère lugubre à laquelle on s’attend est bel et bien au rendez-vous. Les dessins sont gris et gras. Les habitants survivent dans un territoire inerte. Les pages sombres se succèdent les unes aux autres, au rythme du crépitement du dosimètre. Une partie sinistre qui m’a semblé très longue, trop longue, avant que le regard du dessinateur ne change.
Car ce fameux printemps se réveille (enfin) dans la seconde moitié de la BD. Alors, Emmanuel Lepage se surprend à découvrir lentement une beauté qui en ces lieux semble incongrue. Son dessin prend de la couleur et nous, nous respirons de nouveau. Venu « découvrir des terres interdites où rôde la mort », le dessinateur devient spectateur de la vie. La vie des habitants qui continuent de sourire, et la vie d’une nature qui a repris ses droits.
Un printemps à Tchernobyl est un reportage sensible. Le dessinateur a su partager avec sincérité ses émotions. Le dessin est de grande qualité. Pourtant, et même s’il s’agit d’un récit d’espoir, j’ai trouvé les moments de désolation beaucoup trop longs et pesants. Je n’ai malheureusement pas pris beaucoup de plaisir.