Après onze ans et six tomes, Zorn & Dirna, la série de Jean-David Morvan et Bruno Bessadi se conclut. Retour sur une saga macabre et familiale.

Un univers de fantasy n’est pertinent que s’il se démarque de notre Moyen Âge par quelques inflexions allant au-delà de l’ajout de dragons. Dans l’univers de Zorn et Dirna les auteurs ont juste changé une loi universelle et s’amusent à en observer les conséquences : plus personne ne meurt depuis que la Mort en tant qu’entité a été capturée. Loin d’apporter la joie éternelle comme les plus naïfs pourraient le croire, c’est un cauchemar que cette absence a déclenché. En effet, plusieurs axiomes découlent de la modification principale :
1) Les âmes (ici synonymes de consciences) ne disparaissent jamais, ni ne trouvent le repos : elles restent confinées dans des corps qui continuent à vieillir, à se ratatiner, à pourrir. Exception : voir 2.
2) Si l’axe cœur-cerveau est sectionné, l’âme s’échappe du corps désormais inerte et réellement mort... et va se réfugier dans le corps vivant le plus proche.
3) Conséquence : plusieurs consciences peuvent coexister dans le même corps.

Le prolixe scénariste Morvan exploite avec jubilation et inventivité toutes les possibilités qu’offrent ses postulats dans une aventure qui trouve sa conclusion avec ce sixième tome. L’inversion des valeurs habituelles (ici, tuer c’est souvent faire acte de bonté) et les marivaudages issus des changements de corps sont très divertissants. Le dessin de Bessadi, jamais élégant ni plaisant, mais riche en détails sordides, dépeint avec justesse l’Enfer sur Terre. La décomposition des corps est le reflet de la décrépitude morale d’une société où le respect du bien-être d’autrui est simplement nié. L’infâmie des castes dirigeantes y est sans limites. Le traitement cartoonesque et rigolard de l’ensemble est assez surprenant pour un sujet qui traite de l’extermination industrielle, mais l’originalité de cette série lui permet de briller dans un paysage éditorial où fantasy rime trop souvent avec monotonie.

Vladimir Lecointre
aaapoumbapoum
8
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le 10 nov. 2012

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aaapoumbapoum

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