Ce long film souffre de deux défaut majeurs, d'abord sa longueur, on sent la volonté du réalisateur de vouloir absolument faire long, même quand cela ne se justifie pas, d’où certaines séquences étirées parfois jusqu'à l'absurde notamment dans la toute dernière partie, comme si la répétition valait mieux que la concision. La seconde est d'ordre historique et idéologique, Bertolucci a le droit de penser ce qu'il veut, mais, même si on peut le déplorer, le fascisme fut aussi un mouvement de masse en Italie, et très implanté dans les classes populaires, par ailleurs sa vision angélique de la lutte des classes peut faire sourire, (on se croirait chez Dovjenko) mais le sourire devient jaune quand ça tourne au léninisme radical (un propriétaire est un adversaire par définition, la justice est expéditive). Malgré ces casseroles de taille, le film est attachant car, à l'exception de la dernière demi-heure, le film nous montre autre chose, des tas d'autres choses, au début c'est un film sur l'enfance et c'est réalisé en finesse sans aucune mièvrerie, il y a des scènes très fortes, et à ce propos Sutherland assume parfaitement le rôle ingrat qui lui est attribué, de même que sa maîtresse, (comme disait Hitchcock quand le méchant est réussi, le film l'est aussi), la terreur, la lâcheté et l'idiotie fasciste sont montrés sans fard dans au moins quatre scènes chocs, et puis comment passer sous silence cette scène fabuleuse où Stefania Casini dans le rôle d'une gentille pute prodigue une branlette simultanée à DeNiro et Depardieu, façon pour le réal de dire, je montre ce que je veux, quand je veux. Et puis il y a Dominique Sanda qui a rarement été aussi belle et aussi impliquée par un rôle. Et puis Lancaster, Hayden, ils sont tous impeccables. La mise en scène est soignée et parfois inventive, même baroque, la musique de Moriconne est bien placée et se garde d'être envahissante. Et puis cette histoire d'amitié entre Dapardieu et DeNiro sur l'air de " je t'aime, moi non plus est passionnante". Quand ou vous dit qu'il y a plein de bonnes choses, alors oublions la dernière demi-heure, oublions le filigrane marxiste et laissons-nous conquérir par cette épopée hors norme.