A la fin de l'ère Edo, deux pouvoirs cohabitent : la Cour Impériale et le Shôgunat.
Dans le film, le shôgunat est représenté comme vil et cruel : la torture jusqu'à la mort pour les proches des criminels, hommes ou femmes... la Cour Impériale au contraire est dépeinte comme plus compréhensive, plus humaine : le fonctionnaire impérial qui cède quand les samurai s'apprètent à se faire hara-kiri. C'est en tout cas la vision que veut nous offrir le réalisateur en 1964. Aujourd'hui encore, pour la plupart des Japonais, le Shôgun n'était qu'un usurpateur du pouvoir.
Retour au film. A l'arrivée des Occidentaux près des côtes japonaises, l'Empereur voit un danger dans l'envahisseur. Le Shôgun, quant à lui, est plus réaliste, et comprend que le Japon n'est pas préparé à contrer une telle invasion. De plus, à plusieurs reprises, le Shôgun a déjà traité avec l'Etranger, alors que l'Empereur s'était toujours refusé à des échanges. Un des ministres shôgunaux va donc ouvrir le port de Yokohama, et sera rapidement assassiné par les "extrêmistes" isolationistes.
Il est intéressant de constater que lorsque le Shôgunat fut renversé par les partisants de la Cour Impériale, et que le pouvoir total de l'Empereur fut restauré, l'Empereur ne ferma pas le pays aux Etrangers. En fait, Shôgun et Empereur souhaitaient tous deux protéger le pays de l'invasion, mais aucun d'eux n'en était réellement capable. Toutefois, puisque l'arrivée des Occidentaux eut lieu alors que le Shôgun était en charge, ce fut lui qu'on accusa d'avoir failli à son rôle de gouvernance. Cette accusation était un prétexte au coup d'Etat. Car la popularité du Shôgunat avait bien baissé avec l'invasion.
Encore une fois, on dépeint le Shôgunat comme vil et cruel, mais où est-il pour se défendre aujourd'hui ? Qui pourrait crier aujourd'hui que "C'était mieux avant, à l'époque Edo" ?
De même que les livres d'histoire français critiquent le système monarchique du Moyen-Âge, il y a fort à parier qu'une telle propagande anti-shogunale fasse loi encore au Japon. Et puis, ça permet de positionner en héros Sakamoto Ryôma, l'instigateur de la révolution qui a permis de mettre fin au régime dictatorial. Convenient, isn't it ?
Pour ce qui est du film en lui-même : très compliqué à suivre, flash-back qui finissent on ne sait trop quand, très bavard, trop détaillé, et trop de personnages. Mais d'un point de vue technique, c'est pas mal du tout, les images sont belles, les acteurs jouent bien, on a une superbe scène où l'on incarne Sasaki qui marche (et qui va aux putes). Une autre très belle scène où Ryôma joue du Shamisen dans une pièce aux murs tachés de sang.