Parce que sa (alors) trilogie Mad Max était ancrée dans les esprits comme une saga violente et par conséquent non destinée aux enfants, George Miller a longtemps été catégorisé comme un réalisateur amoral dont seuls les adultes avaient le droit de contempler ses longs-métrages. A contrario, le metteur en scène australien a toujours fait preuve d'un humanisme non divulgué, que ce soit la déliquescence de l'âme humaine dans Mad Max, le féminisme engagé des Sorcières d'Eastwick ou encore l'esseulement psychologique dans Lorenzo.
Aussi est-il évident de voir dans sa filmographie cette adaptation de "Babe le cochon devenu berger", roman pour jeunesse écrit par Dick King-Smith dans les années 80, où un cochon orphelin tente de trouver son identité dans une basse-cour britannique. Un projet qu'il tenait à cœur mais qu'il n'a cependant pas réalisé, laissant ce poste au téléaste méconnu Chris Noonan, ce qui entrainera une bataille d'égo douloureuse, Miller étant quasiment omnipotent sur le film, éclipsant malgré lui le réalisateur australien quasi-débutant en matière de long-métrage ciné.
En résulte une adaptation hautement réussie, touchante, qui vise un public jeune sans le prendre pour un faible d'esprit, inculquant des valeurs aussi sobres qu'oubliées telles que le dépassement de soi, l'appartenance sociétale ou l'éducation délicate. Ainsi, à travers cette histoire fantasque de porcinet naïf tentant de trouver sa place dans une ferme hétéroclite, peuplée de créatures aussi diverses que variées, Noonan et Miller délivrent un message simple, universel et attendrissant, le tout soutenu par une mise en scène maîtrisée où animaux réels, animatroniques bluffant et CGI discrets parviennent à rendre le tout aussi cohérent que réaliste.
Parmi les petites perles de films pour jeunesse sortis dans les années 90, Babe fait office de figure de proue voire de modèle inspirant d'autres films animaliers tous aussi réussis comme Paulie ou Stuart Little, parvenant grâce à un scénario vibrant, des doublages réussis et un humour désopilant à enchanter encore et toujours les spectateurs de tout âge.