Attendu comme le Messie, le Dune nouveau aura été languissant avec son public. Les détracteurs de Denis Villeneuve s'en donne à cœur joie pour défoncer le produit à la seule vue de sa bande-annonce, les aficionados en feront tout le contraire, les fans du roman crieront à la fidélité aveugle et les amateurs de SF bayeront aux corneilles. Dune n'est pas un mauvais film : il y a un budget colossal, un casting de choc, une musique enivrante... Et c'est à peu près tout.
Encore une fois, Dune n'est pas un mauvais film, ni une mauvaise adaptation dans le sens où Villeneuve, le vétéran Oscarisé Eric Roth et le tâcheron rameuté par la Warner Jon Spaihts (auteur de The Darkest Hour et La Momie, excusez du peu) ont fidèlement retranscrit les pages du roman de Frank Herbert. Pour autant, en est-ce une bonne adaptation stricto sensu ? Voyageons-nous dans des mondes impensables en cette année 10191 ? Vivons-nous ces aventures trépidantes où un jeune prince va devoir faire face à son destin peuplé d'embûches et de trahisons ? Plongeons-nous dans un univers alliant science-fiction et fantastique ? Jamais.
D'une épuration désarmante, jouant principalement sur des couleurs froides et des effets sonores vrombissant signés Hans Zimmer, Dune semble concocté par Christopher Nolan tant il reste glacial, distant, presque anti-spectaculaire, où décors et costumes ne se différencient que vaguement, où les personnalités des divers protagonistes ne se distinguent pas, où l'émotion semble s'être fait la malle, emmenant avec elle la rêverie et l'évasion. Certes ancré dans un réalisme de roc (Villeneuve faisant du Villeneuve), à la production design travaillée et au gigantisme soigné, le long-métrage en oublie d'être épique, sensationnel, iconique. Aucune scène ni aucun plan ne viendra se coller à la rétine.
D'un Timothée Chalamet littéralement absent à un Stellan Skarsgård inexploité, aucun personnage ne viendra se hisser au pavillon des rôles marquants, et hormis une évasion aérienne au cœur d'une tempête de sable et une poignée de très beaux plans du désert, Dune n'en mettra pas plein la vue, son casting ne nous fera pas oublier celui de Lynch, son rythme lancinant contrastera avec celui bien trop bâtard du film de '84. N'exploitant jamais tout le potentiel ni la richesse du monde qui s'offre à lui, Denis Villeneuve délivre une œuvre extrêmement sage, périclite et oubliable, un film de science-fiction aussi friqué que vain, une première partie aussi fidèle que morne, une déception.