D'abord homme de théâtre (acteur de ses propres pièces), Sacha Guitry se converti au cinéma à partir d'une auto-adaptation, Pasteur en 1935 (exception faite du documentaire Ceux de chez nous en 1915, préhistoire de sa filmo). Aussitôt après il enchaîne avec Bonne chance, première fiction originale de sa part pour le grand écran, imposant plus clairement son style. Ce film aura son remake américain dès 1940 (Double chance de Lewis Milestone).
Conformément à tout ce que sera son œuvre par la suite (le « chef-d'oeuvre » Le roman d'un tricheur est pour l'an prochain), le ton est badin, assez exalté sans perdre en aplomb, les calembours abondent. Guitry imagine une forme d'amour jubilatoire, sans gravité ni sentiments trop profonds. Le plaisir et les gratifications malicieuses sont sa seule boussole ; les scènes superfétatoires se multiplient avec bonheur, le scénario est plutôt un agglomérat de rebondissements plus ou moins grands, rarement surprenants, toujours pétillants. Certains dialogues sont fulgurants (« Vous aimez la forme de mon crâne ?! Alors ne dites pas non ! »).
Guitry affiche son talent comique sans se poser de limites ni se tracasser des 'règles de l'art'. Il essaie des techniques parfois neuves, s'emballant à l'occasion (les volets omniprésents pour signer les enchaînements, au début). Dans un court passage en voiture, il feint d'expliquer à sa partenaire le tournage de telles scènes au cinéma. Il s'agit d'insolence plus que de défiance, mais ces provocations et tout le cortège de vanités agaceront profondément la critique ; au contraire du public, couronnant Guitry de succès au théâtre comme en salles, y compris après les présomptions de trahison portées à son encontre lors de la Libération.
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