Comme ça m'arrive de temps en temps lorsque je veux lire des biographies d'acteurs, je lis Wikipedia. Et en lisant celle de Jean Rochefort, je tombe sur un film que je ne connais pas du tout, nommé Chère inconnue. L'histoire m'intrigue, le dvd est disponible dans un Cash Converter, je me jette dessus, et c'est ce qu'on peut appeler une merveille méconnue, avec rien de moins que Simone Signoret.
Une femme d'un certain âge, Louise, qui se dit elle-même être une vieille fille, est restée dans la maison familiale pour s'occuper de son frère, Gilles, qui est en fauteuil roulant. Ils vivent dans un coin reclus de la Bretagne, avec une seule amie (jouée par Delphine Seyrig) qui vient leur apporter le pain chaque jour.
Louise va se mettre à écrire dans le journal local une petite annonce pour rencontrer quelqu'un et, sans savoir que c'est sa soeur, Gilles va lui répondre. De là va se créer une relation épistolaire entre un homme qui ne sait pas que la femme qu'il tombe amoureux par écrit est sa soeur, et que cette dernière sait que son frère écrit, et va faire en faire de lui répondre de manière passionnée...
Comme je ne connaissais pas du tout ce film, ni entendu parler, j'avoue que j'ai été surpris de voir autant d'émotions, dans le genre des sentiments rentrés, d'un homme qui croit ne pas pouvoir tomber amoureux à cause de son handicap et d'une femme qui tend à maintenir l'illusion de l'amour pour que son frère puisse s'enflammer, et par la même occasion de se dévoiler elle aussi dans ces lettres.
Les deux acteurs principaux, Jean Rochefort et Simone Signoret, sont magnifiques, jamais dans l'outrance ou le cabotinage, et gardent ces réflexes de vieux (garçon et fille), et découvrent en quelque sorte l'amour dans ces conversations à sens unique. Nul inceste là-dessous, mais le maintien d'une flamme passionnelle, de l'ardent désir. Quant à Delphine Seyrig, j'avoue que son personnage de jeune femme un peu bébête est caricaturale, s'offusquant que Rochefort lui pince les fesses ou choquée d'entendre des grossièretés.
Quant à la réalisation de Moshé Mizrahi (titulaire d'un Oscar pour La vie devant soi, avec déjà Signoret), elle montre une Bretagne assez sinistre, où seul la grisaille et le vent semblent exister. Et je lui suis gré de ne pas avoir accentué sur le handicap, car le personnage de Jean Rochefort est très vivace.
Il est assez rare de voir au cinéma des films sur des conversations épistolaires (lues par les acteurs en voix-off), sans vulgarité, ni outrance, et ce Chère inconnue en est une très belle expression.