Le premier film de Vincent Garenq est loin d'annoncer les deux suivants. Engagé, il l'est aussi ; pour le reste, c'est plutôt pauvre. L'engagement lui-même est dérisoire (au maximum, Comme les autres emprunte à un 'cynisme' candide et aveugle conforme à son époque), par rapport aux ambitions de Présumé coupable et surtout à la pédagogie de L'Enquête. Comme les autres traite de l'homoparentalité, au travers des manœuvres d'un quarantenaire (Lambert Wilson) cherchant à satisfaire son vœu de paternité, en dépit de multiples obstacles (dont un sera le choc du milieu de séance). Le premier au-delà des restrictions légales est le désaveu de son amant (Pascal Elbé), soucieux de conserver sa liberté.
Comme les autres pourrait être une de ces comédies insipides avec leur petit supplément 'soci(ét)al' dans l'air du temps ; très vite il s'avère que les choses fonctionnent en sens inverse. C'est un film sincère, parti pour être sensible, instrumentalisant des recettes convenues et imbéciles. Le résultat n'est donc pas trop médiocre mais sent l'inaccompli – ce qui a pour effet positif de tempérer les outrances [par exemple, le cas de la mère porteuse sans-papiers et de son mariage blanc ; deux opérations dont la bassesse évidente est balayée (presque niée) par les liens forts entre Fina et sa future famille]. Tous les moments souhaitant flirter avec la comédie pure semblent incongrus, forcés. Comme les autres a l'air d'un film désinhibé qui n'afficherait lourdement que les avatars les plus éloignés de son sujet essentiel, en les gardant bien compartimentés – comme si cela pouvait donner de grosses scènes burlesques (le craquage de Cathy en est un). La préparation de Lambert pour la visite de l'assistante sociale (il doit se faire passer pour un hétéro) est a-priori le sommet du flop.
Mais il y a ces ellipses en musique conviant dans un en-deçà du ringard : la lettre de motivation est le temps le plus sweet yolo roudoudou, le passage en revue des couples de femmes est susceptible de mettre dans l'embarras. Les sur-jeux attendus des figurantes renvoient au pire des sitcom du service public – sauf dans le cas d'Edith Le Merdy (l’héroïne de Quand on est amoureux c'est merveilleux), assez forte pour tromper le gouffre flapi dans laquelle on la jette. En même temps, les caractères manquent de renforts pour être consistants bien sûr mais aussi parfois pour être cohérents : le consumérisme déclaré de Pascal Elbé n'est pas clair à l'image, ni dans ses répliques ou son comportement général. En revanche Lambert Wilson est transparent en égoïste en train de mûrir, qu'on trouve le personnage imbuvable ou pas. À défaut d'éloquence, au moins Comme les autres sait déléguer aux acteurs ; les deux principaux rôles féminins pourront susciter la sympathie grâce à la fraîcheur de Pilar Lopez de Ayala, ou aux faux-semblants de Cathy/Anne Brochet, la 'bonne copine' avec de gros manques.
Les faux 'contre-clichés' sont de service : c'est la future mamie qui accepte la situation (car c'est un peu d'amour en plus dans la famille) et la sœur qui s'oppose (car il faut une maman, il y a des cadres, etc). Jamais tout ça n'est fouillé ; heureusement car on évite l'intensité dans les grossièretés ; malheureusement le propos du film et à plus forte raison, la petite mission qu'il s'assigne, s'en trouvent affaiblis. Comme les autres étale ses intentions mais les transforme en une matière de sous-drame pour prime time lénifiant. Au point que lorsque tout s'arrange, rien n'est clair concernant la mère et rétrospectivement, toutes les secousses étaient bien naines ; tous les conflits présents dans le film sont des caricatures, articulées de façon lapidaire. Ainsi personne n'est heurté et on apporte pas de quoi satisfaire dans leur hantise les réfractaires à l'homoparentalité ou à la libéralisation des mœurs (le projet d'avortement n'est pas nommé, le papa n°1 est pédiatre donc averti). Finalement ça donne un téléfilm 'vertueux' et frileux.
https://zogarok.wordpress.com/2016/01/07/comme-les-autres/