Après avoir parcouru un bout chemin ébouriffant sur les routes du Girl power avec son Boulevard de la mort, après avoir revisité de façon jubilatoire la mort d’Hitler en suivant cette petite troupe d’Inglorious Basterds, Quentin tarantino, dans sa mégalomanie et son amour du cinéma, continue sa quête de vengeance cinéphilique visant à mettre en lumière les opprimés ayant été contraints à la soumission durant le cours de l’Histoire. Avec Django Unchained, hommage au personnage de Django de Sergio Corbucci, le réalisateur américain suit la destinée d’un esclave noir avant la période de Sécession voulant sauver, avec l’aide d’un chasseur de prime d’origine allemande, sa bien-aimée qui se trouve sous l’emprise d’un esclavagiste sans états d’âmes. Django Unchained, se déguste dans son gras, plaisir à la fois coupable et communicatif, où le réalisateur revient peut être à son meilleur niveau et dont la grande qualité est d’offrir un spectacle fédérateur et décomplexé qui plaira autant au cinéphile qu’au profane du western spaghetti.
Une oeuvre qui dépasse son côté pastiche pour nous livrer un western picaresque et jubilant, au rythme constamment contrôlé. Malgré le sujet grave de la ségrégation raciale, Tarantino joue les funambules entre dénonciation de l’Histoire et réappropriation presque distante et amusée d’une atrocité historique. Ce qui est fabuleux, aussi bien dans Inglourious Basterds que dans Django Unchained, c'est ce désir de planter ses histoires dans l'Histoire, et d'y apporter, par la même occasion, un fond inattendu de la part de Tarantino. Dès les premières secondes du long métrage, Django Unchained sublime ses somptueux décors à la fois arides et neigeux, avec cette réalisation au cordeau qui ne laisse aucune place au hasard et tout ce qui regorge comme tics et gimmicks poseur. Il n’est pas forcément utile de saisir toutes les influences ou tous les hommages visuels aux genres pour se laisser entraîner dans cette chasse à l’homme totalement débridée tant le réalisateur réinvente et s’amuse avec les genres cinématographies (« a nigga on a horse »). On s’amuse comme des petits fous à suivre un récit dense et jamais manichéen où tout le monde en prend pour son grade dans cette cavalcade contre l’esclavagisme.
Mais dans ce Django Unchained souffle un vent de liberté, un amusement presque primaire et décontracté qui inonde l’esprit du spectateur à voir ses combats verbaux transgressifs, à écarquiller les yeux devant ses gun fights trashs compulsifs mais jouissifs, à jouer avec l’anachronisme pop musical où Tarantino s’amuse avec ses joutes verbales qui mettent ses acteurs, plus charismatiques les uns que les autres, sous le feu de la rampe.