On s’était emballé à tort pour District 9 en 2010 et Elysium a le mérite de mettre les choses au clair. Le style de Neil Blomkamp est peut-être exotique, volontariste mais c’est un metteur en scène aux méthodes banales et un auteur sans nuances, presque un enfant médiocre.
Le début est haut-de-gamme. En 2154, l’humanité s’est séparée en deux camps : les happy few et les autres. Autrement dit, la caste des dominants vivant sur Elysium, une station sur orbite dans la stratosphère, jouissant d’un niveau de vie très avancé ; et le monde sous-développé, celui resté parqué sur le plancher terrestre.Les inégalités se sont donc creusées de façon violente, mieux, ces inégalités sont généralisées, elles sont la norme dans une société bien cloisonnée, dont le découpage renvoie à la féodalité. Cela se manifeste en entreprise et pour la protection de l’habitat des nantis. Toutefois la notion des droits de l’homme vient officialiser le cas de conscience des élites de Elysium : on espère le début d’un point de vue critique original, il sera balayé, même si les gentils de l’espace s’avéreront effectivement peu conséquents lorsqu’il s’agit d’assumer leur bienveillance jusqu’au-bout, c’est-à-dire en admettant sur Elysium les entrées illégales.
Après un démarrage prometteur, Elysium s’enlise. L’installation de cet univers à deux vitesses est solide et réjouissante, mais la suite n’est pas à la hauteur, nous faisant mener la course dans une sorte de chasse à l’homme besogneuse. Le point de vue s’avère galvaudé, le scénario est prévisible, les éléments posés pas approfondis et leur existence prolongée par le cliché. Efficace sur le plan de l’action mais par sur la durée, l’ensemble est aussi dérangeant de naïveté. Il enchaîne les non-choix en ne mettant aucun personnage en avant, en-dehors de Matt Damon qui demeure une coquille vide et de Jodie Foster, politicienne au machiavélisme caricatural. On peut apprécier les amalgames kitschs, mais sans les dépasser on atteint vite les limites. Kruger est plus intéressant, Frey semble avoir été catapultée par hasard. La mort expéditive de Jodie Foster montre à quel point Blomkamp est à côté de la plaque quand il s’agit de mettre en valeur des enjeux humains ou même un scénario.
Tout cela est finalement plutôt un décors, un théâtre ; lequel est une réussite mitigée, échouant autant à faire de Matt Damon un héros qu’à générer une vision consistante. C’est une déception, sans surprise certes, car en s’écartant des prétextes sur lesquels elles se fondent, elle donne juste un petit divertissement de SF. Il n’y a certainement pas ici l’essence d’un grand film qui se serait raté, c’est un blockbuster modeste, avec cachet humanitaire et belle inspiration esthétique, manifeste en toutes situations, elle-même rapidement à bout de ses potentialités. Tout de même, des repères solides sur un futur réaliste, mais pour quel dénouement crétin (le bonheur pour tous, c’est si facile) et impulsif : c’est qu’il s’agirait de préméditer l’avenir avant de laisser triompher ses braves émotions.
https://zogarok.wordpress.com/2013/12/05/elysium/