Pour son premier film, Erik Skjoldbjærg nous envoie dans sa Norvège natale. C'est dans ce lieu reculé que deux flics de la Kripos, soit le FBI nordique, vont enquêter sur le meurtre d'une adolescente : l'inspecteur Engström (Stellan Skarsgård), mal vu pour avoir couché avec un témoin dans le passé, et son collègue Vik (Sverre Anker Ousdal), qui présente des signes premiers d'Alzheimer. Une paire de sacrés losers pas très sympathiques envoyés à l'autre bout du pays, là où le soleil de minuit s'avère terrassant et où on aime pas trop les questions douteuses...
Skjoldbjærg s'intéresse autant à cette enquête prenant une tournure inattendue qu'à la personnalité inédite de son protagoniste principal, un salaud de première, un véritable anti-héros qui porte en lui la culpabilité comme une vieille chemise, qui dissimule des preuves à foison et force les portes les plus résistantes. Un vieux loup égoïste et peu souriant qui va peu à peu sombrer dans une spirale psychologique implacable, devenant un flic détestable dont on suit les péripéties avec un certain dégoût.
Le scénariste-réalisateur pond ici un thriller peu conventionnel où les héros sont des méchants et où la moralité est durement mise à l'épreuve, brisant habilement les codes du genre tout en présentant un long-métrage véloce, quasi sans temps mort. Lumière clinique, rythme acéré au montage parfois un peu trop cuté, scénario malin allant là où l'attend le moins... Insomnia est une petite claque servie par une main glacée dont le remake par Chris Nolan différera sur quelques points, notamment une fin toute aussi sombre mais beaucoup moins pessimiste.