Les Universal Monsters sont une série de films de SF et d'horreur produits par les studios Universal entre 1923-1960. Ses morceaux les plus fameux sont les franchises Frankenstein (avec Boris Karloff) et Dracula (avec Bela Lugosi). L'étrange créature du Lac noir appartient à la dernière vague de ces films, celle des années 1950 où les studios se renouvellent au travers de monstres inédits. Malheureusement ils accumulent les one shot et cette page de l'Histoire des monstres au cinéma se referme avec La Femme Sangsue en 1960. L'étrange créature est surtout retenu par l'Histoire comme l'une des premières expérimentations 3D couleur au cinéma – le premier est Bwana Devil deux ans auparavant (1952) et Jack Arnold (L'Homme qui rétrécit) a déjà testé le procédé avec Le météore de la nuit un an avant.
Son audacieux monstre marin était considéré comme crédible à l'époque – il l'est davantage que les créatures en plastique de nombreux bis des seventies, mais fait moins d'effets que la star de Tarantula, autre exploit de Jack Arnold (1955). Le film a donc un intérêt technique et spectaculaire, donc historique. Son contenu en lui-même ne suit pas. Adapté d'un roman de Maurice Zimm puisant son inspiration dans La Belle et la Bête, le film n'en retranscrit presque rien et se contente de faire écho à King Kong (1933) pour montrer sa légitimité à entrer dans la légende. La détresse de ce chaînon manquant vaguement lovecraftien reste primaire, sinon bâclée. La richesse du film est visuelle : les poursuites dans les souterrains, les séquences aquatiques, génèrent une certaine poésie. L'exotisme en revanche est un peu court et demande au spectateur de projeter abondamment pour accorder une épaisseur à ce pseudo Eden rachitique.
Le principal problème tient aux dialogues, lourdingues au possible. Il faut l'entendre pour le croire ; même lorsqu'ils se veulent érudits ou recèlent un potentiel de fond pertinent, on croirait assister à une parodie pour comateux. Ce genre de grossièretés déconcertantes est presque toujours au rendez-vous dans les films bis fantastiques d'avant les 1960s, mais atteint rarement une telle ampleur. En outre, il y a bien des produits très naïfs dans le genre autrement solides, généreux et divertissants ; Le Monstre des temps perdus (1953) est moins équipé et grandiloquent mais finalement plus intense. Néanmoins L'étrange créature aura une grande influence : le point de vue de la bête est copié par Spielberg dans Les dents de la mer, de nombreux artistes font hommage au film voir s'en réclament (Burton, Del Toro, Stephen King, Lady Gaga). Il y aura deux suites (pour une saga 'La créature') dont la première (La revanche) sera dirigée par Jack Arnold.
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