La folie de Jim Carrey au service d'un banal conte de Noël

Qu’est-ce que le Grinch ? Il s’agit d’un croque-mitaine de poils verts et ayant un cœur trop petit pour aimer, exilé dans une montagne (parce qu’il est différent et incompris des autres), avec pour seule compagnie Max, son chien. Cela fait 53 ans qu’il reste terré dans son repère, sortant de temps en temps pour terroriser les habitants de la ville voisine (Whoville, dont les habitants se nomment les Whos). Notamment quand approche les fêtes de Noël, période de l’année qu’il déteste le plus (pour raison personnelle). Mais cette année, le Grinch est bien décidé à gâché les festivités ! Adaptation du roman Le Grincheux qui voulait gâcher Noël (dont Chuck Jones a déjà livré un dessin animé en 1966) de Theodor Seuss Geisel (alias le Dr. Seuss, papa du Chat chapeauté, de l’éléphant Horton et du Lorax).

Bref, il s’agit ni plus ni moins d’un banal conte de Noël. Avec son lot de magie et de bons sentiments. Notamment via cette histoire où une jeune fille, s’intéressant au Grinch et à son histoire, désire réconcilier ce dernier avec les Whos. Car elle sait avec obsession que cette créature n’est pas au fond d’elle le monstre qu’elle semble être. Que tout au plus profond de son âme, le Grinch n’est qu’un être vivant comme un autre qui souffre énormément. Et elle va donc faire tout en œuvre pour que le monde sache qui est véritablement le Grinch, pour que celui-ci soit heureux. Un personnage mythique de la littérature américaine, sans doute, mais qui paraît fort datée. Surtout avec tous ces dessins animés, téléfilms, série TV et films qui se sont déjà penchés sur la magie de Noël. Qui, comme ici, se sont déjà servis de décors et costumes hauts en couleurs et d’une ambiance bonne enfant mais pas révolutionnaire (le compositeur James Horner n’est pas à son meilleur). Difficile donc de trouver un quelconque intérêt à ce film de Ron Howard (réalisateur de Cocoon, Willow, Backdraft, Apollo 13 et des futurs Un homme d’exception, Da Vinci Code et Forst/Nixon).

Mais s’était sans compter sur la présence de Jim Carrey dans le rôle titre. Et vous allez voir que le petit charme de ce film ne serait rien sans cet acteur. Faisant du Grinch une version enfantine d’Ace Ventura et de The Mask. Car si le film se présente tel un conte, cela ne l’empêche pas d’user de son corps et de son faciès malléables pour faire rire. De dépenser son énergie (qui lui est si caractéristique) comme il le fait à chaque fois, afin de donner vie à des personnages totalement barrés et inoubliables. Bref, il s’agit sans l’ombre d’un doute du meilleur comédien qui pouvait endosser la peau du croque-mitaine vert. Au risque d’être caché derrière une tonne de maquillage qui aurait très bien pu paralyser sa gestuelle. Il n’en est rien, fort heureusement, grâce au travail de Rick Baker (maquilleur couronné de sep Oscars et ayant œuvré sur Le Loup-Garou de Londres, Gremlins, Le Professeur Foldingue, Men in Black, La Planète des Singes de Tim Burton…) qui a su rendre le comédien physiquement méconnaissable sans toutefois le gêner dans ses gestes et grimaces. C’est simple, il suffit d’une pose, d’un rapide retournement de tête ou bien d’un sourcil qui fronce pour dire « c’est Jim Carrey ! ».

Le film aurait très bien pu faire comme Batman Forever, en ne comptant que sur la prestation de Carrey et ainsi n’être que regardable. Heureusement, il n’en est rien car Ron Howard ne s’est pas contenté de filmer les pitreries de l’acteur. Lui-même s’est défoulé à la mise en scène et au montage, c’est pour dire ! Comme si l’énergie de Jim Carrey était entrée en lui le temps de faire ce film. Instaurant au Grinch un exceptionnel grain de folie qui n’est pas pour déplaire. Le film est coloré (il n’y a qu’à voir les décors et costumes), énergique (un rythme haletant qui renforce le comique de l’ensemble), déluré (via certains personnages, plans, effets spéciaux et situations) et moraliste (même si le thème de la différence à été traitée maintes et maintes fois, on se laisse porter par l’histoire, racontée avec malice par Anthony Hopkins/Dominique Farrugia). Un long-métrage que n’aurait sans aucun doute pas renié Tim Burton (surtout quand on voit Charlie et la Chocolaterie) et qui lui aurait donné bien plus d’ampleur.

Voilà ce qu’est Le Grinch : un sympathique conte de Noël. Peu original, bien souvent guimauve et aux personnages secondaires inexistants. Sauvé par la folie de Jim Carrey et de Ron Howard, qui ont su faire oublier les défauts de ce film pour qu’il se présente comme une comédie familiale délurée et bon enfant. Ce qui en fait un divertissement idéal pour les fêtes de Noël, bien au-dessus des téléfilms avec Whoopi Goldberg et Tim Allen.

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