Martien go home
Les films de série B présentent bien souvent le défaut de n'être que de pâles copies de prestigieux ainés - Alien en l’occurrence - sans réussir à sortir du canevas original et à en réinventer...
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le 21 avr. 2017
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Et si on faisait un film à la manière d’Alien le huitième passager mais plus moderne, avec des variations pertinentes, des effets spéciaux contemporains, une belle OST, un rythme plus soutenu, des acteurs bien réputés ces derniers temps... histoire d’offrir quelque chose d’autre aux fans que l’immonde Alien Covenant à venir ? Et voilà comment Daniel Espinosa en vient à réaliser Life, origine inconnue. Un sous-titre français un peu naze, soit dit en passant, vu qu’on sait très bien d’où vient la forme de vie en question mais passons et parlons du film en lui-même pour voir s’il a ce qu’il faut pour s’inscrire parmi les films de science-fiction horrifiques à voir.
Le budget de presque 60 millions de dollars, 2 fois moins que l’infâme Prometheus quelques années plus tôt, est suffisant pour offrir une réalisation de haute volée. Et il le montre merveilleusement dès un premier plan directement dans un espace obscur progressivement transpercé par des couleurs éclatantes puis un magnifique plan-séquence avec caméra flottante dans la Station Spatiale Internationale. Si le film ne saura pas toujours être aussi époustouflant, ça reste une sacrée entrée en matière et ce ne seront pas les seules scènes impressionnantes du film, loin de là. Et comme c’est un film d’horreur, ça ne sera pas toujours par la contemplation des jolies images.
J’ai trouvé les morts très efficaces, assez violentes et gores sans être dans l’excès, la peur de la victime est très bien retranscrite, ça ne se passe jamais de la même façon, c’est souvent un peu inventif, ça peut réellement surprendre... Si certaines scènes pour faire flipper sont un peu trop prévisibles car classiques, dans l’ensemble le film sait être un film d’horreur très honorable de ce point de vue-là. Ce n’est pas une nouvelle référence du genre comme avait pu l’être Alien en son temps, quelques effets de mise en scène sont un peu trop déjà vus dans d’autres films du genre, il y a quelques jumpscares un peu faciles… mais c’est très satisfaisant dans l’ensemble.
La créature, point central de ce type de film, n’a clairement pas été appréciée par tout le monde, du fait d’un design original et des apparitions très régulières. Je peux le comprendre mais à titre personnel j’ai beaucoup aimé l’évolution de son apparence et la façon dont elle est filmée pour montrer à la fin à quel point elle en impose. Entre son hyper agressivité, son intelligence à toute épreuve, ses capacités de survie inépuisables et sa dangerosité absolue au moindre contact, c’est une parfaite machine à tuer de science-fiction horrifique et lui opposer des esprits scientifiques cherchant à utiliser l’environnement de la station et de l’espace pour le vaincre est on ne peut plus pertinent et maîtrisé.
La reconstitution de la station internationale dans un décor réel, le principal challenge technique du tournage, a été particulièrement soignée pour faire de ce terrain d’affrontement entre l’homme et l’Alien un terrain tout aussi ludique que réaliste, ce qui est toujours appréciable. Il en va de même pour les combinaisons spatiales et les mouvements des acteurs imitant l’absence de gravité. Je trouve juste un peu dommage que les sorties dans l’espace ne soient pas plus nombreuses mais le budget ne permettait sans doute pas de tout faire et celles auxquelles on a droit sont très réussies donc inutile d’en tenir rigueur plus que ça.
L’OST, composé par Jon Ekstrand, venant de collaborer avec le réalisateur sur Enfant 44, sait appuyer efficacement les moments de contemplation comme d’angoisse. Elle n’a peut-être pas une très grande identité ou un thème spécifique mémorable, mais comme le reste elle fait bien son travail jusqu’à une dernière musique épique très réussie : Godspeed, Doctor apportant beaucoup d’intensité dramatique. Et si Life a déjà pu faire preuve de pas mal de qualités à ce stade de la critique, il en a encore pas mal à faire valoir.
Le film prend d’abord le temps de présenter la demi-douzaine de personnages que nous allons suivre avec un rythme permettant de bien identifier les protagonistes, de s’attacher à eux, de se demander quand et comment la situation va dégénérer... et cela va arriver assez rapidement avec un élément perturbateur très intelligent en soi à mon sens :
Le choc électrique pour ranimer Calvin peut très bien être interprété de sa part, car on peut le penser capable de raisonnement déjà à ses débuts, comme une agression le plaçant dans une situation de légitime défense et de là vient le conflit qui va s’amplifier. Ce n’est pas juste une créature qui d’un coup s’est libéré bêtement et a décidé de tuer tout le monde, ça revient au même résultat mais le point de départ est à mon sens plus intéressant et amène à une petite réflexion qui a défaut d’être d’une grande profondeur ajoute tout de même une plus-value à l’ensemble du film.
La créature Alien fait un très bon antagoniste sauvage, féroce, surpuissant... ce n’est pas le fameux Xénomorphe sur le plan qualitatif bien sûr, mais c’est de qualité à ne pas douter, un point essentiel du film, ce qui le fait avancer avec une intrigue centrée sur lui. Et si j’apprécie son introduction comme antagoniste, j’ai adoré également la conclusion de son carnage :
Je me suis complètement fait avoir par le twist final le rendant victorieux, je le trouve extrêmement bien amené avec un montage parfait pour qu’on se fasse piéger au premier visionnage et qu’on se dise que c’était tout à fait logique au deuxième. De plus, c’est un choix très audacieux puisque tous les sacrifices des personnages n’auront mené qu’au pire des scénarios pour eux. Enfin, la cerise sur le gâteau c’est la musique qui intensifie énormément le passage tout en s’accordant très bien avec le montage précédemment évoqué.
Je n’ai pas été dérangé par un défaut souvent cité : les réactions des personnages qui seraient un peu trop stupides. Pour moi elles le sont juste assez pour faire évoluer l’intrigue et humaniser les protagonistes, pas trop au point de nous faire sortir du film, d’être incohérent avec leur niveau de compétence théorique ou encore de nous faire détester certains personnages. D’autant qu’il y a souvent une explication qui justifie, au moins en partie, l’erreur commise et une action de bravoure ou d’intelligence à un moment par le même personnage pour compenser.
Les acteurs s’en sortent plutôt bien pour la plupart, voire très bien avec un Jake Gyllenhaal toujours aussi performant. Le casting international est aussi respectueux des nationalités des personnages. Il est assez intelligent également de mettre en avant des acteurs dans la communication plus que d’autres de façon à ce que l’on suppose ceux-là survivants plus longtemps alors que ce n’est pas nécessairement le cas. Je ne pense pas que ce soit une maladresse mais bel et bien un choix que je trouve réussi puisqu’il permet justement quelques surprises scénaristiques plutôt bienvenues.
Tout n’est pas réussi pour autant bien sûr, il y a quelques moments de sentimentalisme un peu trop accentuées, quelques choix audacieux forcément sujets à controverse, quelques lenteurs dans le rythme à accepter... Ce n’est pas un film parfait mais ces défauts sont selon moi assez mineurs, en tout cas ils ne m’ont pas dérangé plus que ça à mon premier comme à mon second visionnage où je me suis dit que je n’étais pas passé à côté des défauts mais tout simplement qu’ils n’avaient pas le même impact sur moi que la plupart des spectateurs.
Vous l’avez compris, j’ai beaucoup aimé Life qui est pour moi un excellent film à la manière d’Alien. Il en reprend l’idée de base et la structure pour proposer une œuvre à part entière avec ses propres idées souvent pertinentes, un rythme maîtrisé de bout en bout, des personnages intelligemment écrits, une horreur authentique et efficace… C’est l’exemple typique d’un film qui sait ce qu’il veut proposer, qui concentre ses efforts juste où il faut pour le réaliser, qui s’inspire de son modèle sans oublier de rester différent de lui et si je le compare à Alien Covenant sorti la même année, c’est un chef d’œuvre ! Mais en même temps ce n’est pas bien dur.
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Créée
le 19 janv. 2018
Modifiée
le 19 nov. 2024
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