Une pénurie totale de pétrole plonge peu à peu le monde dans une situation de crise. Les nations entrent en guerre et se battent pour l'exploitation des dernières ressources, les populations se révoltent jusqu'à sombrer dans l'anarchie. Des bandes de pirates sillonnent les routes, à l'affût du moindre véhicule susceptible de leur fournir quelques litres de gazoil de plus. Face à la montée en puissance de la criminalité, seuls quelques policiers de la route tentent de faire régner un semblant d'ordre. Mais devant la brutalité déployée par les pillards et la corruption du système judiciaire, les effectifs de ces derniers garants de l'ordre s'amenuisent de jour en jour. Parmi les derniers flics en poste, un certain Max Rockatansky surnommé le Fou pour sa propension à défier "à la dégonfle" ses nombreux adversaires dans des duels routiers quasi-suicidaires. Refroidi par un attentat commis sur son équipier, Max renonce et rend sa plaque pour aller se réfugier avec sa famille en bord de mer, loin de toute cette folie. Jusqu'à ce que le destin le rattrape...


Imaginez qu'elle ne fut pas la surprise en 1979, lorsque sortit ce film d'anticipation aux séquences d'action débridées et à la violence extrême. Une brutalité qui à l'époque aura tôt fait de choquer les critiques bien-pensantes lesquelles taxeront le jeune Miller d'irresponsable, rien que ça. Et la France d'interdire la sortie du film sur son sol pendant trois longues années avant d'être contraint de céder lors de la sortie internationale du second opus. Les français auront donc découvert ce premier film quasiment en même temps que sa suite, la réputation de l'objet ayant déjà éveillé l'intérêt de tous les cinéphiles.


On pourrait alors croire que Mad Max n'est qu'une succession de séquences brutales et gores. Il n'en est pourtant rien. A une quelconque violence graphique, Miller choisit de privilégier l'art du hors-cadre et de suggérer plus qu'il ne montre. Mieux encore, lorsqu'il montre la violence, le jeune réalisateur va jusqu'à appuyer de manière grotesque certains de ses effets visuels à l'écran pour contrebalancer la brutalité de ses images. La violence de Mad Max est de manière générale d'autant plus choquante qu'elle laisse au spectateur le soin d'imaginer ses conséquences sans jamais en révéler plus qu'il ne faut à l'écran.


D'un point de vue narratif, Mad Max premier du nom impose un background légèrement différent de ses suites. Ici, le spectateur peut encore se raccrocher à quelques repères temporels ne serait-ce qu'à travers ce commissariat délabré ouvrant le film, cette ville dépeuplée et déliquescente, ou encore cette cellule familiale formée par Max, sa femme et son fils.
Là où Mad Max 2 prendra pleinement appui sur un contexte post-apocalyptique, le premier Mad Max nous offre une vision des derniers soubresauts de cette civilisation défunte, gangrenée par la violence, la haine et la vengeance. La perte progressive de confort technologique exacerbe les tensions jusqu'à anéantir toute morale. Seul l'esprit de meute et la loi du plus fort prévaut désormais. Les flics eux-mêmes semblent, dans leur attitude équivoque, tout aussi aliénés que les pirates qu'ils traquent.


Attention SPOILER


La seule possibilité de salut pour Max réside ainsi dans sa famille.
En balayant toute possibilité d'espoir par le sacrifice cruel de sa femme et de son fils en cours de métrage (une séquence d'une grande violence émotionnelle qui ne montre pourtant... rien), Miller enclenche une mécanique narrative déjà éprouvée dans quantité de vigilante movies et autres films de vengeance.
Mais loin d'offrir une quelconque échappatoire à son "héros", le réalisateur lui permet juste de venger ses proches sans apporter la moindre réponse quant au devenir de celui-ci. Moralement détruit, faisant preuve dans l'ultime séquence de tout autant de cruauté que les bourreaux de sa femme et son fils, Max n'est plus qu'un mort en sursis, un policier probablement fou hantant les routes d'un monde qui n'a plus lieu d'être.


Le piège pour George Miller aurait alors été de céder à la facilité en faisant de Max un énième justicier solitaire, un ersatz futuriste de l'homme sans nom de Leone. Il n'en sera rien car Miller préféra imposer une continuité cohérente à la trajectoire dramatique de son héros et consacrera l'essentiel de son second film à la résurrection morale de Max.
FIN DU SPOILER


Côté mise en scène, Miller transcende un budget misérable par une réalisation fluide et nerveuse tout à fait innovante à cette époque. Bien sûr depuis, plusieurs films sont passés par là (mais sont-ils plus impressionnants ?) et le style a pris un coup de vieux.
Il n'en demeure pas moins que la mise en scène était tout à fait singulière en 1979 dans sa manière de cadrer à ras-le-bitume une série de courses-poursuites ayant valeur d'enjeux dramatiques.
Ainsi, la poursuite finale, véritable point d'orgue narratif, demeure une séquence d'anthologie tant la colère du protagoniste transparaît à chaque plan cadré par Miller.


Mad Max s'impose donc comme un prologue indissociable de ses suites, faisant du protagoniste une véritable figure tragique et justifiant ainsi sa trajectoire dramatique au fil de la trilogie. A mon sens, bien qu'inférieur à son illustre suite, ce premier opus demeure un remarquable film de revanche et d'anticipation.
Certains jeunes de l'époque auront bravé l'interdit pour pouvoir voir ne serait-ce qu'une séquence de ce film "amoral" dont on condamnait dans tous les médias "l'extrême brutalité". Une polémique qui aura longtemps donné à ce Mad Max la valeur d'un objet occulte et déviant. Aujourd'hui le film est disponible partout et personne ne semble plus vouloir le voir.
Ce qui est marrant avec le temps, c'est qu'au fur et à mesure, il devient ironique. Vous ne trouvez pas ?

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le 24 juil. 2014

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Buddy_Noone

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