Parmi les nombreuses productions hollywoodiennes à la qualité discutable qui sévissent sur les écrans depuis plusieurs années, une saga est parvenue à se défaire de cet aspect purement commercial en tenant toujours autant la distance. Cette franchise à succès, c’est bien évidemment Mission : Impossible, adaptation de la mythique série TV tenue d’une main de maître par son acteur/producteur star qu’est Tom Cruise, qui fait défiler les réalisateurs tout en leur permettant d’apporter leur pierre à l’édifice. Lourde tâche pour Christopher McQuarrie de succéder à Brian De Palma, J.J. Abrams et Brad Bird (le second opus de John Woo fait pâle figure face aux autres films). Mais avec son pedigree non négligeable (très bon scénariste, à qui l’ont doit notamment Usual Suspects, et réalisateur de la surprise qu’avait été Jack Reacher), le bonhomme avait toute les qualités pour faire de ce Rogue Nation un cinquième épisode de qualité. Mission amplement réussie !
Il est vrai qu’aux premiers abords, Mission : Impossible 5 n’a pas grand-chose d’exceptionnel : un réalisateur au style visuel inexistant et un scénario sans réel travail d’écriture (surtout après la thématique de Brad Bird avec Protocole Fantôme). D’autant plus qu’on nous ressert une trame quasi similaire dans laquelle nos héros doivent, seuls (leur fameuse agence ayant fermé ses portes), faire face à un adversaire introuvable Un divertissement lambda qui délivre son lot de sensations fortes à grand renfort de cascades, fusillades et courses-poursuites. Avec en prime des effets numériques certes peu nombreux (deux ou trois principaux de tout le film) mais terriblement laids, revenu à la séquence de l’hélicoptère du premier opus (la scène durant laquelle la voiture fait des tonneaux n’en est que plus explicite). Mais malgré cela, après ou pendant le visionnage, vous ne pourrez vous entendre crier que ce Mission : Impossible – Rogue Nation se révèle être le meilleur film de la franchise. Un best-of de que cette dernière a su nous livrer depuis son initiation en 1996.
Même si la finesse et la personnalité scénaristique de l’opus précédent n’est plus de mise ici, Rogue Nation ne vous laissera pas sur votre faim. En effet, le long-métrage renoue plus que jamais avec ce qui faisait le sel de la série et du film de De Palma, à savoir le suspense. Bien entendu, l’action n’est pas en retrait et répond toujours présente en proposant des moments véritablement endiablés et impressionnantes. Mais c’est avant tout une histoire faite de rebondissements bien amenés jusqu’à la dernière seconde, de mystères attrayants et de personnages bien écrits (Simon Pegg n’est plus le bouffon de service, Rebecca Ferguson a à l’instar de Furiosa dans Mad Max Fury Road l’un des meilleurs rôles féminins de ces dernières années à Hollywood au point de piquer la vedette au protagoniste principal). Haletant au possible, ne perdant nullement le spectateur et amusant ce dernier en oscillant avec justesse entre humour, tension et grand spectacle, le script de Mission : Impossible 5 est un véritable bijou de divertissement sans prise de tête et qui ne prend pas le spectateur pour un imbécile, allant même jusqu’à mettre à jour certaines réalités toujours enjolivées au cinéma (l’entente et le fonctionnement des agences d’espionnage à travers le monde) et jouer avec les codes hollywoodiens comme sur Jack Reacher (il suffit de voir le final avec l’antagoniste) ainsi que ceux de la saga elle-même (le masque en latex, l’accroche « Votre mission, si toutefois vous l’acceptez »…).
Mais c’est également du côté de la mise en scène que Rogue Nation saura mettre tout le monde d’accord. Si visuellement parlant elle ne marque pas les esprits, le savoir-faire de McQuarrie se trouve ailleurs. Ne passons pas par quatre chemins : sa manière d’user de la caméra envoie balader tous les réalisateurs actuels qui s’essayent aux blockbusters (notamment ceux de chez Disney/Marvel). Même si nous sommes bien à des années lumière de la monumentale claque de George Miller et de son Mad Max 4, Mission : Impossible 5 impressionne. Par le spectaculaire des séquences d’action, filmées au plus près et avec réalisme, qui mettent en valeur des cascades hors normes de Tom Cruise (resté accroché à un Airbus en plein vol, être en apnée pendant 6 minutes le temps d’un plan-séquence…). Par la mise en évidence des décors qui deviennent des personnages part entière du film, notamment celui de l’opéra qui occupe un bon quart d’heure de l’ensemble. Par des effets de réalisation inattendus et diablement efficaces (l’instant de silence avant la fusillade à Londres). Par un souci du détail au niveau du montage qui a de quoi donner des sueurs froides au public durant la séance. Vous l’aurez compris, McQuarrie complète son scénario déjà bien charpenté avec des talents de cinéaste confirmés qui s’étaient faits remarquer sur Jack Reacher.
Les plus sceptiques diront qu’il ne s’agit-là que d’un divertissement américain. À cela, je leur répondrai que Mission : Impossible 5 n’a qu’un seul but assumé depuis le tout premier opus de la franchise : amuser l’assistance. Et non seulement le long-métrage y parvient, mais il réussit sa mission bien au-delà des espérances, étant tout simplement un blockbuster de très grande envergure parvenant à faire valser sans mal la concurrence qui se perd dans le n’importe quoi (Jurassic World, Terminator : Genisys) ou bien la « non prise de risques » (Fast & Furious 7, Avengers : l’Ère d’Ultron, Ant-Man). Le divertissement à l’état pur aux défauts minimes (quelques longueurs et des effets numériques bas de gamme heureusement peu présents) et surtout à la qualité irréprochable !