Dans cette suite directe de Nekromantik, monstre underground exaltant la nécrophilie, une femme récupère un corps dans un cimetière, pour l'aimer et le chérir. Ce second opus est supérieur à son modèle. Épuré et cohérent, avec une certaine ampleur dramatique, il est servi par d'étonnants et fluides mouvements de caméra (comme on en retrouvera dans Schramm du même auteur). Contrastant avec celle de l'opus précédent, la BO s'avère assez subtile, alternant sons mélodiques et plus inattendu, électro tapageuse. Il y a des airs de Dellamorte Dellamore, sans la grâce ni le côté lunaire, avec plutôt cette tonalité dépressive, laconique et sarcastique qui est le propre de Buttgereit.
Naturellement c'est encore graveleux et ridicule : par ces séquences autour des doubleurs de porno, ces tentatives surréalistes banales, mais surtout par son style et ses manies (la découpe d'un corps d'otarie), tout simplement. Buttgereit a cette manière de se fixer sur les objets et de les étreindre compulsivement, en cherchant à tout figer dans la dégradation et un romantisme terreux, visqueux et dégoûtant. Il n'accorde de crédit qu'au corps, c'est pour ça aussi que ses personnages sont si creux, c'est pour ça qu'il ne pourra rendre l'intériorité de ses humains que dévorante, obscure et pathologique dans Der Todesking et Schramm.
Ce goût du trivial, du vivant absent à lui-même , de l'organique régressif, on ne le trouve exprimé de la sorte que chez lui. On dirait un gamin qui a tourné le dos à la vie avant de la connaître. D'ailleurs l'hésitation de l'infirmière pour ses rapports intimes, entre son amant de l'autre monde et son compagnon vivant reflète celle du cinéaste, entre un monde commun perçu de façon simplette et gentille ; puis le néant et la chair inerte. Ce n'est pas vraiment perturbant pour quiconque un temps soit peu endurci, c'est plutôt curieux. Décevant mais tolérable. On jouit où on veux, sinon où on peux. Le monde de Buttgereit est peu attrayant, peu pertinent, mais il a sa pureté, sa vérité, si rétrécie et négative soit-elle.
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