Noé
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Noé

Film de Darren Aronofsky (2014)

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Ni un film biblique, ni un film d'imagination

Pour commencer, je vais essayer de lever quelques petits malentendus concernant le film.
Ce n 'est pas un film biblique.
Et ce n'est pas un film de spectacle, mais un film de thèse.


Ayant dit que ce n'est pas un film biblique, partant de là, on ne s'étonne pas des libertés prises par l'auteur, on se dit: il est parti du mythe biblique, et il a fait preuve d'imagination. C'est une réinterprétation fantaisiste, un peu délirante, genre BD d'heroic fantasy, souvent ridicule, mais ça le mérite de sortir de son imagination.
Au passage, puisque ce Noé, sa famille, le récit de ses aventure, n'ont à peu près aucun rapport avec le récit biblique de près ou de loin, il aurait tout aussi bien pu lui donner un autre nom.


Ben. Loupé. C'est pas ça non plus.


Donc d'où ça sort?


Réponse:
Tout droit d'un texte gnostique qui s'appelle le Livre d'Hénoch (<200 av JC), qui raconte comment les Veilleurs, un groupe de démons (pour rappel: anges qui ont trahi Dieu et l'homme, et qui ont perdu leur nature d'anges, pour devenir... autre chose), chassés du paradis, et tombés comme des merdes, essayent de se venger de l'homme et de l'entraîner avec eux dans leur chute.


Le mot Veilleur est d'autant moins une coïncidence, que leur chef a exactement le même nom dans le Livre et dans le film. Je veux bien croire au hasard, mais c'est un peu gros, là.
Il s'agit du démon Samyaza, qu'on invoque aussi dans certaines pratiques de magie noire assez hard core.
La seule différence, c'est que le démon Samyaza est super sympa dans le film.


C'est un film miroir. tout ce qui est décrit bon dans la Bible ou le Livre d'Hénoch, devient mauvais dans le film, et tout ce qui est décrit comme mauvais devient bon.
C'est une inversion qui est souvent utilisée dans les milieux lucifériens (j'ai pas dit sataniste, luciférien et sataniste, ce sont deux choses différentes)


La thèse gnostique est la suivante:
Lucifer, le porteur de Lumière est bon, et celui qu'on appelle Dieu est mauvais, et c'est ce dieu mauvais qui n'est pas un vrai dieu, mais qui a créé l'Univers (donc l'Univers est très mauvais, et il faudrait lui faire péter une bonne bombe dans le gueule, histoire d'effacer la création du faux dieu pervers)
Vous remarquerez que le film l'appelle le Créateur, comme le font les gnostiques, mais il ne l'appelle pas Dieu, car ce n'est pas le vrai Dieu, seulement celui qui a le culot de créer le monde, et de tout faire de travers en plus.
La coexistence de cs deux dieux, se voient en filigrane dans le film. Le Créateur est celui qui punit injustement les démons de pierre (symbole aussi de nos âmes enfermées dans la matière vile et putride, autre thème cher aux gnostiques), mais celui qui les réintègre, est le vrai dieu généreux.
Sinon c'est pas très cohérent, ils ont été punis, pour avoir aider l'Homme dans le jardin d'Eden, et sont réintégrés pour un travail de forçat.


Alors, donc quand Noé veut supprimer les gamines, on est sur la même lancée, il incarne le héros gnostique bon, qui souhaite la destruction de ce monde qui n'est que mauvais. Des courants inspirés de la gnose, il y en a eu en France, comme les cathares, qui jouissent d'une belle image romantique de nos jours, mais ils proposaient purement et simplement d'arrêter de faire des enfants, pour que le monde s'arrête. Car ils pensaient que le Diable était le Créateur du monde.
Je ne suis pas favorable à la violence, on aurait pu les mettre tous en prison au lieu de verser le sang dans des guerres contre eux, mais c'est une bonne chose qu'on les aient combattus. Mettons qu'ils aient réussi à convertir une grande partie de la France, ben on serait tout simplement pas là. Bien plus dangereux que les sectes Moon ou compagnie.


Donc Noé est l'incarnation du héros gnostique, qui veut supprimer la procréation pour faire cesser le mal (il y a aussi ceux qui veulent faire cesser les générations pour amener le jugement dernier, c'est aussi assez particulier comme délire)
Je soupçonne que l'intention du réalisateur, c'était que Noé incarne ce héros gnostique jusqu'au bout (il est le seul vraiment pur du film), mais il n'a pas osé...
Le film qui se termine sur l'image des petites filles poignardées, ça aurait été à la fois logique par rapport aux thèses en présence, mais aussi tellement violent que le film aurait été mis à l'index partout.
Alors il se rattrape en montrant bien que Noé, loin de connaître un revirement moral et une prise de conscience, regrette amèrement sa décision. Le monde est mauvais, l'homme est mauvais (le film ne fait absolument aucun doute là-dessus, à aucun moment) et tout va sans doute recommencer.
Mais comme le Créateur est pervers, c'est pas grave, sauf pour nous.


Tout sauf un film d'espoir sur un nouveau départ pour l'humanité.

Perce-Neige
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le 27 oct. 2015

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