Okja
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Okja

film de Bong Joon-Ho (2017)

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Cochonnours contre Monsanto Swinton

Cette production Netflix devrait constituer une étape importante dans l'Histoire du cinéma (au moins celle de sa diffusion), à cause de sa sortie exclusive sur internet (et non en direct-to-video comme les 'exclus'), à un passage cannois près. Okja réunit un réalisateur (Bong Joon-Ho) et un gros casting (Tilda Swinton) aux notoriétés internationales, ainsi qu'un budget de super-production ; une première, sauf invraisemblables accidents industriels, pour un film ne passant par les salles.


Okja confirme les talents et limites d'un réalisateur (celui de The Host, Memories of Murder et Snowpiercer), tout en rendant explicites ses vues sociales. Dans les deux cas le rendu est optimal, concernant la limpidité, le divertissement, la capacité à entraîner – la profondeur et l’ambiguïté qui ont pu caractériser certaines de ses œuvres sont révolues. Sur la forme c'est du Bong Joon-Ho habituel, déployant son génie pour l'affectif et l'action (culminant lors d'une séquence où un couple de cochons montre son intelligence émotionnelle), pratiquant une manipulation visible mais efficace ; c'est aussi moins riche et malin que promis et même moins original qu'au départ (le cinéaste coréen n'avait jamais tant tiré -ce sera sur la fin- vers les réflexes typiques du blockbuster pour américains).


Le héros éponyme et ses semblables ressemblent plutôt à des hippopotames avec des traits ou expressions de chiens domestiques, presque de labradors, quelquefois des bouts d'allure rappelant les vaches. Sa mise au point numérique a été dirigée par le responsable des effets spéciaux de L'odyssée de Pi (Erik-Jan De Boer). La gamine qui vient de passer dix ans avec la créature est le seul protagoniste humain entièrement aimable. Elle est déterminée, rejette toutes pressions ou sollicitations, traverse les turbulences, les rangées d'alliés ou d'antagonistes sans se faire absorber, ni par les corrupteurs, ni par les croisés.


Le film ne rate pas ses personnages, leurs défauts et demi-vérités, quoiqu'il laisse de la marge pour le jugement du spectateur concernant la Mirando 'blanche' et les sortes d'éco-terroristes sino-américains (qui précisent bien, toujours, qu'ils sont non-violents). Ces derniers restent les auteurs de cas de conscience mal placés et utilisent 'K' (Glenn de Walking Dead -Steven Yeun- recyclé en traducteur) comme un bouc-émissaire ; il a menti, il a surtout cautionné leur volonté. Gyllenhaal est en roue-libre comme jamais en narcisse maniaco-dépressif, à l'opposé de son rôle plutôt placide dans Life tourné parallèlement. Son personnage est sans enjeux intrinsèques, c'est la mascotte et l'agent du mal poussé par ses vices de caractères plutôt que par des convictions ou des besoins réels.


Tilda Swinton incarne en deux facettes un capitalisme 'fantaisiste' avec ses labels consensuels, son cynisme lustré et ses faux-semblants. La petite sœur Mirando essaie d'embellir la multinationale agro-chimique, souhaite l'envelopper dans son image rose-bonbon-pétillant – les dures réalités la rattraperont quelque soit sa sincérité à appliquer le vernis. La dure loi du marché est considérée par toutes les parties et chacun se montre, selon ses capacités, réaliste sur la chose : corriger (l'emballage et la nature des produits), faire irruption avec sa moralité en bandoulière, ou assumer carrément sa domination, autant de manières d'aborder les échanges de masse. D'ailleurs, dans le monde tel qu'il est, Okja se sauve par le business, non par les sentiments. Le cochon d'or comme substitut du veau. C'est simple, catégorique, à l'image d'un film clair dans le discours, fournissant des représentations faciles à comparer au réel, sans y diluer sa 'touche personnelle'.


L'angle mort d'Okja vient de son goût trop prononcé pour les personnes ; il est centré sur le cas d'Oka et sa maîtresse, pas sur les autres ; focus sur les Tilda corporate, les processus restent à la marge – on ne voit que le plus sensationnel, l'abattoir. En même temps, de cette façon, le film évite probablement d'inévitables débordements de mièvrerie ou des triomphes niais. C'est probablement plus fonctionnel pour remplir les consciences et secouer le consommateur – l'étiquetage 'film vegan' est fondé. Ce ne serait qu'un gros coup d'épée dans l'eau (les français ont continué à manger des Marguerite après La Vache et le prisonnier) si Okja ne sortait pas à une époque où se multiplient les scandales sanitaires. La cause animale sera toujours plus facile que n'importe quelle cause sociale, d'où l'avantage de cet opus sur Snowpiercer pour être retenu par la hype et la postérité.


https://zogarok.wordpress.com/2017/07/04/okja/

Zogarok

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