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Incroyable, je remonte la note d’un Rocky en le revoyant… Au-début, j’étais même presque plus gaillard que ça tellement je trouve les scènes de courses sur la plage avec la musique 80’s absolument...
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le 15 mai 2013
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"Hé, Balboa, espèce de ringard ! Qu'est-ce que tu fous à chialer comme une gonzesse depuis deux films comme ça ? T'as pas l'impression de tourner en rond, non ? Alors viens te battre avec moi, connard, j'te prends où tu veux, quand tu veux ! Je vais te massacrer, je vais pas danser comme Apollo machin, là, je vais t'éclater la gueule, ton chirurgien pourra plus rien pour toi, c'est moi qui t'le dit !"
Le respect est mort, comme disent les jeunes, et ce troisième Rocky semble donc annoncer un changement de ton pour le moins drastique... Les deux premiers volets s'inscrivaient dans la logique du Nouvel Hollywood, mouvement alors en pleine rayonnement dans les années 70. Films d'auteur, qui se présentaient sous la forme de films sportifs pour mieux dépeindre la situation sociale de l'époque, les Rocky entrent dans une nouvelle décennie et entendent s'adapter pour survivre. Les années 80, c'est la déferlante des blockbusters, initiée quelques années plus tôt par Les Dents de la Mer et surtout Star Wars. Le spectateur moyen vient maintenant au cinéma pour en prendre plein la gueule et, avec Clubber Lang en charmante hôtesse d'accueil, il ne sera pas déçu.
On enchaine dès l'intro les victoires de l’Étalon Italien, dans un montage dynamique qui tranche déjà avec le rythme jusqu'ici plutôt posé de la saga. En parallèle, on suit le parcours musclé du nouvel opposant, Lang, qu'on ne cherchera jamais à rendre crédible à la manière d'un Creed. A présent, on a juste un Iroquois très énervé qui veut péter des gueules, surtout celle des ringards, et qui n'hésite pas à tuer des petits vieux quand ceux-ci lui barrent la route. C'est bon, niveau agressivité, ou on en rajoute ?
Rocky, devenu riche et célèbre comme l'acteur qui l'incarne, a mystérieusement perdu sa gouaille frénétique et sa gestuelle quasi-chamanique et se contente de prendre des poses hiératiques en lançant des regards profonds. Pour la première fois, je n'ai plus eu l'impression de voir Rocky à l'écran mais bien Stallone qui se met en scène, avec moins de conviction que d'habitude peut-être. Certes, l'idée derrière tout ça, c'est de montrer comment le succès vous transforme un homme, mais je trouve que Sly y a été un peu fort. De plus, avec le physique taillé à la serpe que ce dernier affiche, on ne nourrit plus guerre de doutes sur les cocktails chimiques qui circulaient sur le plateau...
Musculairement trop sec et écorché pour ressembler à un véritable boxeur, Sly parvient en outre à offrir des combats encore moins réalistes qu'à l'accoutumée: cette fois, Rocky se contente de prendre des dizaines de coups dans la gueule pour "fatiguer" son adversaire. Une garde ? A quoi ça sert, ça ? "Vas-y, frappe-moi, allez !" Bam ! Bim ! Boum ! Les coups pleuvent, les deux hémisphères de son cerveau échangent sûrement leur place à plusieurs reprises, mais ça passe, parce que l'enfant de Philadephia est solide... Vous comprendrez que j'ai trouvé ces combats extrêmement frustrants, tout comme celui du deuxième opus d'ailleurs, là où le premier proposait une rencontre bien plus crédible et équilibrée entre les deux opposants.
Et comme vous pouvez vous y attendre, tout cela n'a finalement pas énormément d'importance. Retournement de situation digne d'un épisode de Game of Thrones: ce troisième film se révèle plus subtil que l'égo-trip défouloir que sera Rocky IV ! En effet, le projet principal de Sly semble être de littéralement se moquer de son image, voire de l'écorner. Aux situations grotesques (le match de "catchboxe", pitié !) succèdera la plus grande défaite de Rocky et une remise en question fondamentale qui le verra repartir "de zéro".
Stallone fait montre d'une étonnante lucidité sur sa carrière d'acteur qui, à l'époque, n'a encore connu aucun autre succès commercial que celui de la saga de Rocky. Sly sait que sa situation idyllique peut s'arrêter à tout moment et le colosse mis KO par un uppercut comme sait si bien les distribuer la vie. Pour la première fois, Rocky a peur, ou est-ce Sylvester Stallone ? Peu importe, le message est clair et immédiatement assimilable par chacun. C'est à une nouvelle leçon de courage et d'humilité à laquelle nous avons droit et la motivation soudain retrouvée du personnage est si contagieuse que visionner ce film constitue un remède immédiat contre toute forme de résignation.
Échappant au risque de surplace qu'on entrevoyait dans l'épisode précédent, Rocky III, se risque au changement formel, pas toujours heureux, mais ne perd rien de sa dimension sacrée: mettre le divertissement au service d'un message populaire et positif: l'exaltation de la famille et des amis en tant que source d'encouragement toujours renouvelée, la certitude qu'il n'y a aucune épreuve, si ce n'est la mort, dont on ne puisse se relever à force d'acharnement et de foi.
Épopée Rocky:
Rocky: https://www.senscritique.com/film/Rocky/critique/219121374
Rocky II: https://www.senscritique.com/film/Rocky_II_La_Revanche/critique/219165595
Rocky IV: https://www.senscritique.com/film/Rocky_IV/critique/221980430
Rocky V: https://www.senscritique.com/film/Rocky_V/critique/222583800
Rocky Balboa: https://www.senscritique.com/film/Rocky_Balboa/critique/29214257
Créée
le 1 juin 2020
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