Près de 10 ans après l’avoir découvert dans les salles obscures, ma plume (qui a des allures de rouleau compresseur, le présent papier étant écrit sur les ruines d’un précédent avis) se fraie de nouveau un chemin vers les étoiles pour réagir à un commentaire d’un internaute posté sur un forum concernant ce volet au combien polémique du space opera de Georges Lucas.
La contoverse justement, parlons-en, porte sur l'éternelle question : Le Réveil de la Force est-il un mauvais Star Wars ? Malgré les années, les films et les autres productions pour le petit écran qui ont pour scène une galaxie lointaine, très lointaine (et même au-delà), cette question n'a jamais été véritablement tranchée et ce sont les propos tenus par Matthew Vaughn qui ont eu le don de remettre une pièce dans le juke box car, selon le réalisateur de Kingsman, un remake de la trilogie originale ne serait pas une si mauvaise idée que cela.
Pourtant, s'il y a bien une chose sur laquelle tout le monde est d'accord, comme le rappelle non sans un certain sarcasme le commentaire susmentionné, c'est bien que l'Episode VII est un Episode IV à peine remanié (l'autre grande question consisterait à savoir si J.J. Abrams en avait conscience lorsqu'il était en train d'écrire le scénario...). Il est d'ailleurs inutile de s'attarder plus en détail sur la liste des similitudes entre les deux volets, lesquelles se manifestent tant au niveau de l'écriture des personnages, de l'enchaînement des péripéties ou même des lieux et autres planètes visités, parsemant ce septième Episode de déjà vus nostalgiques ou révoltants en fonction du bord dans lequel vous vous placez. Ce qui nous amène à réorienter le débat en se posant une autre question (avant même de répondre à la première, certes, mais, vous vous en doutez, celle-ci suscitera toujours autant de vrombissements de sabres laser imaginaires) : à qui s'adressait Le Réveil de la Force ?
Cette question peut s'avérer plus importante qu'il n'y paraît car les principaux détracteurs de l'Episode VII sont ceux qui connaissent la saga sur le bout des doigts et qui reprochent à Mickey d'avoir bafoué son héritage en proposant quelque chose d'aussi peu inspiré. Mais, après tout, n'est-il pas, au contraire, particulièrement approprié d'introduire une nouvelle génération de fan de la même manière que celles et ceux qui ont découvert Star Wars en 1977 ? Si Vaughn suggère que Disney a manqué le coche en s'éloignant trop de l'histoire des Skywalker (même si, là encore décidément, il peut y avoir débat car les cinématiques du jeu vidéo The Old Republic peuvent susciter plus d'excitations que ce qui a pu être raconté sur Anakin et ses rejetons), force est de constater que le but poursuivi avec, au moins, le premier film de la postlogie et celui ardemment désiré par celui qui a porté à l'écran le comics Kick-Ass se rejoignent. L'effet suite-remake est même allé jusqu’à parasiter, ironiquement et ce malgré tous les efforts de Rian Johnson, l'Episode qui aurait pu mettre tous les fans, les nouveaux comme ceux de la premières heures, d'accord. Cependant, au lieu d'être cet Episode fédérateur, Les Derniers Jedi a sabordé le navire, ne donnant d'autres choix à J.J. Abrams, rappelé en urgence par le studio aux grandes oreilles suite au départ Colin Trevorrow, que de recoller les morceaux, littéralement, avec un Episode IX qui n'est pas non plus épargné, tant par l'effet remake évoqué ci-avant que par les critiques.
Nous nous retrouvons donc avec une trilogie complètement déséquilibrée (out of balance, si vous me le permettez) qui ne fonctionne pas malgré le fait qu’elle ne partait pas, tout compte fait, de la pire des manières. Le Réveil de la Force faisait office d’une « promesse d’aventure », pour reprendre les derniers mots de son script, qui n’était pas sans défaut (loin de là) mais qui comptait plus de points positifs que ses détracteurs ne veulent bien le reconnaître : on ne se privera pas de rappeler que le film profitait notamment d’une belle photographie, John Williams rempilait avec une partie du casting original, laquelle laissait place à de nouvelles figures au potentiel inégal mais bel et bien présent, permettant de donner un coup de fouet à la franchise et d'insuffler, dans le même temps, une « conscience du mythe », comme l'écrivait Film Exposure dans sa critique, particulièrement plaisante. Malgré ses maladresses et ses facilités, cette réintroduction s'inscrivait dans le sillage de la trilogie originale et ouvrait un champ des possibles en entretenant une certaine nébulosité quant à la disparition des radars de Luke Skywalkers ou encore de l'émergence de nouveaux antagonistes (et il y avait de quoi faire...) pour continuer de raconter l'histoire et aller de l'avant.
Le fin mot de cette courte défense consiste à dire que le Réveil de la Force mérite une certaine indulgence car il n'est pas la raison pour laquelle la postolgie entache désormais à jamais la saga intergalactique. Le fait de ne pas avoir pris le temps d'écrire les trois films avant de lancer la machine est regrettable mais revenir aux fondamentaux d'entrée de jeu, tout en n'oubliant pas d'apporter du neuf, peut aisément être excusé compte tenu des quelques décennies qui séparent l'Episode IV de l'Episode VII et s'avère plus stimulant, je vous prie de l'admettre, que ce que propose Matthew Vaughn. 6,5/10 !