La Croatie n'a pas vraiment droit à énormément de publicité par chez nous au point de vue de son cinéma. C'est donc toujours avec une forme de curiosité que l'on découvre une oeuvre qui a droit à une sortie en DVD par chez nous, même à très petit prix. A Wonderful Night in Split, film de Arsen Anton Ostujic, est un film choral évoquant le destin croisé de plusieurs personnages et les liens qu'ils vont avoir lors de la nuit du 31 décembre au 1er janvier.

La première chose qui étonne, c'est la mise en scène. Ostojic propose une réalisation incroyablement stylisée, avec de longs plans-séquences, suivant généralement les personnages à travers les petites ruelles de Split. Le tout est très propre. Le second élément étonnant est probablement l'utilisation du noir et blanc, très particulier, à mi-chemin entre le traditionnel et ce qui s'est vu dans Sin City.

Nous suivons l'évolution de plusieurs personnages dans cette nuit de fête. Un jeune couple qui s'apprête à vivre leur première fois, un ancien soldat dealer de drogue, une paumée camée, un baron local bientôt mort, un soldat américain suicidaire, tels sont les "joyeusetés" de ce film. Pourtant, difficile de sentir le désespoir tant la mise en scène n'appuie pas là-dessus et ne sombre pas dans quelque chose de pathétique.

Ostojic fait évidemment partie d'une génération qui a trop bien connu la guerre des Balkans, la destruction et la violence. Ici, à travers son film, ce sont ces inquiétudes sur son pays, la Croatie qui ressortent. Des inquiétudes, mais également des constats. La Croatie, à la sortie de la guerre, est en ruines. Les feux d'artifices du Nouvel An rappellent étrangement les bombes qui s'abattent sur les villes. Une vieille femme hurle son désespoir (au début on peut croire qu'elle se remémore la guerre, mais on découvrira plus tard pourquoi). C'est aussi une jeunesse désabusée ou des personnes plus âgées qui ne voient que la drogue ou la fuite pour sortir d'une forme de misère.

Ostojic est également assez doué pour les faux-fuyants. Il donne une idée d'une situation et la chamboule par après, grâce à la découverte plus précise d'un autre personnage, comme pour la vieille femme par exemple. L'oeuvre se termine avec les deux jeunes tourtereaux sous un trip de LSD. Le jeune garçon évoque la volonté de pouvoir voler et rejoindre Neverland. Il saute d'un toit et se met effectivement à voler. Ostojic propose probablement l'envie de retrouver une forme d'innocence pour cette jeunesse, mais aussi la possibilité pour eux d'évoluer dans un monde qui leur offre de vraies chances.

Il manque cependant une puissance narrative dans ce film que pour en faire un tout grand. Peut-être aussi le constat un peu noir rebutera certains. Mais n'oublions pas encore d'où viens Ostojic et ce qu'il a connu. En fait son film est avant tout assez poétique et un bel exercice de style. Pour une première, c'est vraiment pas mal.
batman1985
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le 11 févr. 2013

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