Expérience déstabilisante mais qui a su me captiver. Pendant une heure et dix minutes, Godard nous transporte dans un film où virevoltent les images en tous genres, où les sons s'entrecroisent et où les réflexions s'enchaînent, tantôt longuement, tantôt succinctement. Et pour tout vous dire, j'étais particulièrement emballé au début de cette aventure. On rentre directement dans le vif du sujet (ou plutôt "des sujets") et Godard ne nous lâche plus. On a l'impression qu'à chaque fois qu'une idée germait en lui, il prenait sa caméra pour la traduire à l'écran. Dans ce pèle-mêle d'idées, de sons et d'images, il est revanche parfois difficile de s'y retrouver. Godard utilise différentes formes de langages et son montage est déroutant. J'aurais franchement préféré que Godard laisse parler davantage l'image. Certaines scènes sont éblouissantes de beauté, par ce qu'elles filment, par ce qu'elles racontent et je suis déçu que ces scènes soient coupées si brusquement, alors qu'elles montraient du vrai, de la beauté. Et une fois encore, les expérimentations sonores de Godard m’agacent plus qu'elles ne m'impressionnent.
Mais sur la forme, je resterai plutôt élogieux. L'utilisation de la 3D est étonnante, j'aime ces deux passages où chacun de nos yeux voyait une image différente dans la même scène. Je ne pense pas qu'un autre cinéaste ait fait ça dans le passé, en tout cas c'était surprenant et bien vu. La scène devenait plus intrigante, plus intense même. Après outre le son, on retrouve les acteurs pantins qui ne m'émoustillent pas une seule seconde. Quitte à prendre en exemple un autre film de Godard qui parlait de langage et du sens des mots, je préférais le traitement d'Alphaville. Plus simple, moins surjoué, plus "vrai" et beaucoup plus subtil. Mais d'un autre côté, certains passages m'ont franchement remué. Difficile de passer à côté de la courte scène où ces deux enfants jouent et s'éloignent vers l'horizon. Il y a de l'humour aussi, on passe d'ailleurs à peu près par tous les états. Et j'aime ça, ça rend le film particulièrement vivant bien que ces ressentis ne soient pas tous positifs.
Après l'appréciation de ce film sera surtout subjective. Et mieux vaut se laisser emporter plutôt que de l'intellectualiser (non pas que le film soit vide de sens mais pour le coup, il vaut mieux le ressentir que chercher à tout comprendre). Pour ma part je suis agréablement surpris, et même si je n'adhère pas à tout ce qui est proposé ici je ne peux que conseiller l'expérience car il y a beaucoup de choses à en tirer et le travail de forme est très intéressant. A ne voir qu'au cinéma et en 3D en revanche, indispensable pour profiter pleinement de l'oeuvre. Ça donne envie d'approfondir Godard encore. En bien ou en mal, il ne cessera jamais de me surprendre.