A près de 85 ans, Jean-Luc Godard continue ses expérimentations, dans la veine de celles entamées il y a près de 20 ans, depuis ses Histoire(s) du Cinéma disons (il faut dire que depuis les années 60, il n'arrête pas d'expérimenter, le bougre). Il continue de déstructurer le langage cinématographique, de peindre sa toile de plus en plus abstraite à l’aide de ses caméras-pinceaux, de ciseaux et de colle virtuels. Ici, il en rajoute une couche en s’attaquant à la 3D. L’usage qu’il en fait est assez fascinant. C’est bricolé à l’artisanale et ça tend vers la poésie. Il innove, même. Il invente. Entre autres choses, il fait un truc que je n’ai jamais vu auparavant (en même temps, je vais rarement voir des films en 3D) : à deux ou trois occasions, il superpose deux plans, deux séquences différentes. Ça fait tellement mal à la tête qu’on se met à cligner des yeux. Et là, miracle, on se rend compte que si l’on ferme l’un des deux yeux, l’image que voit l’autre est parfaitement nette ! Ainsi, en alternant rapidement fermeture de l’œil droit et de l’œil gauche, on peut suivre deux séquences, deux actions qui se répondent. C’est assez amusant.

Pour le reste, c’est du Godard dernière manière pur jus (Eloge de l’Amour, Notre musique, Film socialisme...), en encore moins narratif, en encore moins compréhensible, si possible. Avec toujours ces traits d'humour (il ne se prend jamais vraiment au sérieux, le monsieur), avec toujours ces quelques fulgurances qui font qu’à un moment donné, on a l’impression de tout comprendre en une fraction de seconde avant de replonger dans le chaos voire la consternation. Mais toujours, toujours, l’esprit en alerte et la curiosité piquée. J’aime aller voir ses films pour l'expérience, pour la sensation qu'ils me procurent. Je me laisse porter. Comme si je me laissais porter par le courant d’une rivière. L’impression d’être à la fois tranquillement guidé et balloté dans tous les sens. Lettres/mots écrits, textes lus, voix, dialogues, sons, musique et image, tous en décalage, obligeant le cerveau à effectuer des recollages rapides, qu’il n'arrive jamais à faire complètement.

Comme d’habitude, je ne conseille ce film à personne, à part aux inconditionnels de Godard, dont je fais partie, et, peut-être, aux curieux prêts à tout.

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le 18 juin 2014

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CharlieBrown

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