J’avoue que comme pour les films de Kervern/Délépine j’attends toujours les œuvres de Dupontel avec une certaine impatience même si on peut parfois – rarement – avoir de mauvaises surprises (comme pour les duettistes de canal d’ailleurs) ; même si sa filmographie est parfois irrégulière avec un humour qui passe plus ou moins bien (selon nos sensibilités).
Où le très bon (Bernie, 9 mois ferme) côtoie le bon (Au revoir là-haut) et le moyen (Enfermés dehors, Le vilain) mais globalement on sait qu’avec Dupontel il va toujours se passer quelque chose, qu’on aura droit à notre dose d’anticonformisme et de provocation. Et désormais de poésie.
Tout ça pour dire que globalement, j’apprécie bien son univers, ses délires et son humour.
Avec ce film Dupontel est à mi-chemin entre le côté trash ce ses premiers films, notamment Bernie et le côté plus onirique, poétique de « Au revoir là-haut » d’où parfois une impression de décousu, Dupontel voulant alterner les deux facettes de son univers cinématographique.
Adieu les cons ce sont trois individus, que tout oppose, et qui se retrouvent en fuite (fuite éperdue, sans avenir), un informaticien suicidaire, une mère atteinte d’une maladie incurable et qui souhaite retrouver son fils né sous X alors qu’elle avait quinze ans et un archiviste aveugle qui a perdu la vue lors d’une bavure policière.
Le point fort du film c’est l’histoire elle-même, la façon dont elle évolue et dont elle est narrée, son traitement. Car si Dupontel est à son niveau habituel d’acteur et de composition, aucun des autres rôles ne crève vraiment l’écran y compris Virginie Efira, assez neutre, en demi-teinte.
Même si l’impression de décousu est bel et bien présent Dupontel s’en tire plutôt bien et les passages poétiques (poésie qui rime souvent ici avec folie douce) et ceux plus enlevés (un petit côté « polar » où la police en prend pour son grade mais ici c’est plutôt bon enfant, rien de bien méchant), s’emboîtent bien.
On est plus proche du cartoon que de la provocation « bête et méchante » (mais que j’aimais bien néanmoins) de Bernie.
Et toujours un côté loufoque, absurde qui convient à l’univers à part de Dupontel, grandement influencé par les Monty Python (le film est dédié à Terry Jones décédé en 2020) et Terry Gilliam fait une apparition remarquée.
Mais un univers que certains trouveront hermétique et auquel ils n’adhéreront pas.
Car Dupontel a l’art pour décortiquer les travers de notre époque, il porte un regard piquant mais lucide sur notre monde ; comme d’autres il dénonce la déshumanisation de notre société mais à sa façon ; et le metteur en scène y apporte sa petite touche d’originalité (par exemple la scène de l’ascenseur dans le building de la multinationale où la technologie informatique délirante se mélange aux sentiments et à l’amour avec comme fil conducteur la difficulté d’exprimer les choses).
Un film entre drame et comédie, entre poésie et révolte qui ne manque pas d’intérêt par sa mise en scène mais malgré tout je ne reste pas complètement convaincu par rapport au potentiel du bonhomme, l’impression qu’il pourrait parfois aller encore plus loin, qu’il a encore une marge de manoeuvre et de progression, qu’il n’utilise pas encore la pleine mesure de son talent...tout en restant un des réalisateurs français les plus intéressants.