La dernière année de lycée. Ce point de bascule quasiment définif entre les derniers soubresauts de l'enfance et l'âge adulte. Ce moment où l'on réalise que des visages qui, pour certains, nous accompagnent depuis des années, vont forcément être amenés à s'estomper en vagues souvenir avec le temps. Ce moment où l'on se raccroche le plus vivement à notre insouciance pour contrebalancer la peur d'une plongée dans un gouffre rempli de questions sans réponses sur l'adulte que l'on sera amené à devenir...


Et puis BOUM !!! Une camarade de classe de Mara explose en plein cours de mathématiques ! Comme ça, spontanément et sans aucune explication. Si le drame laisse complètement perplexe l'école et les autorités sur son origine, il a au moins un effet bénéfique pour Mara : Dylan décide de prendre son courage à deux mains et lui avoue ses sentiments. Âmes soeurs instantanées, les deux lycéens vont vivre une histoire d'amour... alors que d'autres élèves vont continuer à exploser...


Vous l'aurez compris, cette mystérieuse épidémie de bombes lycéennes est évidemment une idée très bien pensée pour faire éclater en accéléré toute l'ampleur du mal-être de ces pré-adultes face à un avenir incertain. Ici, vos connaissances disparaissent littéralement sous vos yeux dans un geyser de sang pour signaler la fin d'une époque et le côté complètement aléatoire de ce qui vous attend derrière ! Vos doutes sur l'après-lycée se transforment en questions sur votre propre survie à court-terme ! Et se raccrocher aux vicissitudes de la vie adolescente avec légèreté devient presque une obligation pour pouvoir gérer une situation qui échappe à tout contrôle ! C'est d'ailleurs le premier grand amour que Mara vit avec Dylan qui lui permet dans un premier temps d'étouffer la folie ambiante par leur humour commun. La bulle amoureuse et badine que les deux lycéens se construisent semble en effet agir comme un rampart devant l'étrange phénomène mais les instants si agréables de leur romance ne peuvent figer définitivement le temps et ils sont constamment rattrapés par de nouvelles explosions, symboles d'un futur qui mettra forcément leur relation en péril à un moment ou à un autre...


Tiré du roman d'Aaron Starmer (je ne me prononcerai pas sur la fidélité ou non de l'adaptation, ne l'ayant pas lu), "Spontaneous" impressionne donc vraiment par la brillante utilisation métaphorique de son concept -dans le fond, tout bête mais diablement amusant- pour exacerber et même concrétiser l'abstraction des peurs qui accompagnent le passage si désarçonnant à l'âge adulte. En plus, le film réussit même jusque dans son traitement à exprimer ce point de rencontre entre deux époques en trouvant un habile équilibre entre la pure comédie grâce au échanges très drôles de ses tourtereaux et le sérieux finalement assez réaliste sur l'ensemble de la situation qui aurait pu pourtant vite tomber dans le ridicule entre d'autres mains moins expertes. Blindé de vannes et de références pop' efficaces, "Spontaneous" peut bien sûr compter sur les manifestations hasardeuses de son épidémie pour toujours assurer de généreuses surprises (le climax du phénomène est juste fou en ce sens) mais l'osmose qui règne entre la qualité des dialogues et l'irrésistible énergie de sa comédienne principale, Katherine Langford, y est également pour beaucoup dans sa réussite (n'oublions pas de mentionner Charlie Plummer/Dylan et tous les seconds rôles, des adultes aux élèves, le casting est parfait !).


Seul gros regret notable qui empêche peut-être "Spontaneous" de se hisser au statut de vraie petite pépite en son genre : sa dernière partie (après le climax évoqué). Malgré de bons moments d'émotion, le film marque le pas niveau rythme et perd nettement en subtilité en voulant beaucoup trop expliciter les tenants et aboutissants de son discours là où la métaphore faisait si bien le job. Cela peut être perçu comme un paradoxe mais "Spontaneous" paraît presque suivre de trop près le sort de son héroïne avant de se reprendre dans un excellent final qui nous laisse heureusement avec les plus belles qualités du film en tête à la sortie.


Mis à part ce faux-pas, on notera pour finir que "Spontenaous" acquiert encore un nouveau degré de lecture au vu de la gestion calamiteuse de la pandémie actuelle par les autorités US, une preuve de plus que ce premier film de Brian Duffield est un coming of age movie décidément des plus surprenants qu'il serait bien dommage de manquer.

RedArrow
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le 26 oct. 2020

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