Ai Weiwei : Never Sorry par Patrick Braganti
Documentaire passionnant et instructif sur un artiste contemporain chinois dont la création majeure et reconnue à travers le monde entier résonne en écho de son propre engagement politique qui le désigne aujourd'hui comme cible de son gouvernement qui, après son arrestation en 2011, l'a maintenu en détention pendant 81 jours. Sa libération provisoire a restreint le champ de ses déplacements et de ses interventions, alors qu'il se déplaçait jusqu'alors sur toute la planète pour inaugurer les différentes expositions qui lui sont consacrées, comme à Munich ou à Londres. Toujours entouré d'une bande d'assistants, l'homme qui se définit avant tout comme un concepteur, un créateur bien plus qu'un fabricant de ses installations, est infiniment sympathique, affichant une réconfortante cohérence entre ses principes et ses actes. Le film illustre ainsi les rapports complexes entre art et politique et comment le mariage est mal vécu dans la Chine actuelle, toujours prête à arrêter puis enfermer les artistes récalcitrants. Il montre aussi la place prépondérante prise aujourd'hui par le web, lieu privilégié de l'expression de l'opposition et de la contestation (via le blog de Ai Weiwei et la toile immense de ses partisans qui le suivent et le soutiennent par le biais des réseaux sociaux dont il a assimilé à la perfection les rouages et les effets). C'est donc un immense paradoxe que soulève ce documentaire : comment un artiste reconnu et ovationné d'un bout à l'autre de la planète peut-il encore être le sujet d'une telle discrimination, aveugle et stupide, de la part du régime de son pays, sachant que son arrestation et sa disparition physique sont immédiatement relayées par le net. Un combat et une idéologie d'arrière-garde pour un créateur résolument d'avant-garde.