Asperge le mytho
Le dédale nous égare : Ridley Scott, en retournant à ses premiers amours, ne nous en facilite pas nécessairement l’accès : retour du monstre, suite de son prequel, quête des origines, récit fondateur...
le 12 mai 2017
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Après Prometheus, on aurait pu se douter que Ridley Scott avait développé une véritable haine envers ses chefs-d’œuvres de SF des années 80 que sont Alien et Blade Runner. Et ce Covenant le confirme sans état d’âme.
En tant que film d'horreur, ce Alien Covenant est un ratage complet. Jamais flippant, jamais tendu. Le film se permet de désacraliser son bodysnatcher titre en le montrant sous toutes ses coutures numériques sans jamais penser à l'iconiser de quelque manière que ce soit. Lors de la fameuse séquence du piège tendu au prédateur par ses proies, l'Alien entre dans la salle en marchant comme si de rien n'était. Une telle haine du matériau d'origine fait peine à voir et montre bien un réalisateur en perte de vitesse. Scott préfère ridiculiser son oeuvre phare plutôt que d'accepter avoir déjà raconté la meilleur histoire dont il était capable il y a 40 ans.
En tant que film d'aventure SF, ce Alien Covenant est d'une paresse incroyable. Jamais prenant, jamais dépaysant. Les acteurs (tous plus mauvais les uns que les autres) débarque sur une planète étrangère ressemblant au Maine. L'imaginaire n'a de place que dans une imagerie numérique complètement laissé de côté. A l'instar de cette immense cité dont on ne verra rien de plus qu'un la vague figure des bâtiments en toile de fond. Pourquoi introduire une telle imagerie dans le film pour ne jamais s'en servir ? Aucune idée. Les séquences d'action sont molles quand elles ne sont pas ridicule (cf. Daniels qui cours sur le planché des vaches alors qu'elle est accroché à un vaisseau qui s'écrase derrière elle, magnifique !)
Les acteurs ? Katherine Waterston prouve, après les animaux fantastiques, qu'elle n'a pas la carrure pour porter un film. Où est l'aura et le charisme de Sigourney Weaver ici ?
Danny Mcbride n'est jamais crédible dans ce rôle sérieux de pilote aguerri.
Billy Crudup semble avoir oublié son âme au vestiaire en venant. Tant mieux car son personnage est sans doute le plus mal écris du film.
Enfin le bon Michael Fassbender, véritable premier rôle du film surnage en effet dans cet océan de médiocrité. Aucun mérite pour le coup, d'autant que l'acteur part dans un egotrip plutôt dérangeant.
Pour ce qui est du déroulé de l'action, l'ensemble du film sonne faux. On peut éventuellement sauvé quelques plans (la naissance du premier Neomorph dans la navette, seul moment de bravoure du film, malgré une écriture stupide), mais l'ensemble est convenu et plat. La cohérence scénaristique est à jetée aux oubliettes. Les personnages ne se posent jamais de questions logiques et agissent tous en fonction d'un script pré-écrit (oui c'est normal, mais ça ne doit pas se voir !).
Devant le cadavre d'une de ses membres d'équipage, le personnage de Crudup suit béatement l’androïde David (au comportement plus que suspect) et se laisse tuer sans surprise.
Enfin, venons en au cœur du film. Les Androïdes !
C'est précisément là que l'on se rend compte que Scott aurait pu (dû ?) réaliser un film intégralement sur ce sujet et ne pas ressortir la saga Alien pour justifier son délire. Les scènes avec David et Weyland, puis celles entre David et Walter sont les plus réussies du film. En suspend totale et basé uniquement sur le ressenti des spectateurs, la scène de la flûte est très belle et d'une sensibilité assez rare dans le cinéma américain moderne. Dans ces moments (courts), le film prend son temps et pose une véritable ambiance. On est loin du génie de Scott pour Blade Runner (le baiser), mais la patte visuelle du réalisateur éclate dans ces quelques scènes.
Scott, dans un egotrip particulièrement flippant, propose dans ce film, une réflexion parfois assez prenante sur la création. Il a même le bon gout de la traiter par le biais de la création artistique. Le problème, c'est que le film étant un film Alien, il ne laisse que peu de place à cette réflexion. Le tout débouche au final sur la création des xénomorphe par David. En plus de n'avoir aucun sens, le film trahi la mythologie Alien. Si David a créé les Aliens, OU EST LA REINE ?
Encore une fois, c'est la License Alien qui semble trop lourde à porter pour le réalisateur et ses scénaristes.
Evidemment cela ne suffit pas à sauver le film du naufrage. Si le style visuel de Scott fait toujours illusion (attention, CGI dégueulasses à prévoir), le reste du projet n'a aucun intérêt. Jamais respectueux envers son matériau de base, le film se déroule sans passion ni envie de bien faire. Le film, quand il ne sait plus où aller, reprend quasiment plan par plan son modèle d'origine, sans jamais chercher à le transcender. C'est également le cas pour les musiques qui ne sont qu'une réorchestration paresseuse des thèmes de base. On pourrait retenir celle de la naissance du xénomorphe (scène qui aurait pu être belle si le scénario et les CGI ne venait pas gâcher le tout), mais non.
Décidément, Scott rate le coche à pratiquement tout les niveaux et je déconseille fortement la vision de ce film.
Créée
le 18 mai 2017
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