Asperge le mytho
Le dédale nous égare : Ridley Scott, en retournant à ses premiers amours, ne nous en facilite pas nécessairement l’accès : retour du monstre, suite de son prequel, quête des origines, récit fondateur...
le 12 mai 2017
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Le plus grand mérite d’Alien : Romulus aura été de me donner vraiment envie de revoir Alien : Covenant. Je trouvais que ma critique de l’époque (13/05/2017) n’était pas terrible et j’avais envie de revenir sur certaines choses. Je tiens à préciser que mon avis sur ce film n’a pas changé : je l’aime vraiment, malgré quelques défauts. Avertissement : je vais dévoiler pas mal d’éléments de l’intrigue, donc voyez-le si ce n’est pas déjà fait avant de lire la suite.
Replaçons-nous dans le contexte des années 2010. Suite à l’excellent Prometheus, la 20th Century Fox demande à Ridley Scott de mettre plus de Xénomorphe dans son prochain film. Le projet, qui était au départ envisagé sur 5 films, sera finalement une trilogie. Le deuxième film a d'abord été intitulé Prometheus 2, puis nommé Alien Paradise Lost avant de devenir Alien : Covenant. Cette suite, je l'ai attendue avec impatience pendant 5 ans.
Au moment où j’écris cette critique, je ressors de mon troisième visionnage du film, et je suis toujours aussi impressionné par la tension incroyable qui règne tout au long. Le fait de connaitre les évènements ne gâche en rien le plaisir, au contraire. On a encore plus peur pour les personnages sachant l’horreur qui les attend.
Alien : Covenant est un véritable plaisir pour tous les amateurs de cinéma de science-fiction horrifique : visuellement très beau, on sent le soin apporter aux détails (l’atterrissage de la navette sur le lac, la scène avec l'ouverture du compartiment de terraformation dans l'espace). Les acteurs sont tous excellents, même ceux qui font de la figuration. Ils sont vraiment crédibles, à commencer par Michael Fassbender, qui avait crevé l'écran en 2012, et revient 5 ans plus tard en pleine forme pour incarner deux personnages (les androïdes David et Walter). Le rôle traditionnel du personnage principal féminin échoit à Katherine Waterston (vu dans Les Animaux fantastiques quelques mois auparavant).
Le film s'emboîte parfaitement avec Prometheus, en approfondissant l’univers notamment par le biais des expérimentations de David. Cela nous conduit à découvrir le Néomorphe, créature proche du Xénomorphe mais considérée comme inférieure. Ce qui ne nous empêche pas d’assister à l’une des scènes les plus marquantes de la saga, à savoir la naissance du premier Néomorphe. Je n’ai pas vu de scène aussi viscérale depuis dans le cinéma de ce genre.
La thématique de la création est au cœur du film : David s’est émancipé de l’espèce humaine, mais est devenu un monstre car il a commis un génocide et tué celle qu’il aime, Elizabeth Shaw. Il reconnait en Walter un frère qu’il tente de rallier à sa cause en essayant de développer son humanité. Mais le modèle androïde a été révisé depuis, et ses tentatives se soldent par un échec.
Alien : Covenant répond aussi à LA question : d'où vient le Xénomorphe ? C'est assurément ici que réside l'élément le plus important du film. Et j'avoue que je n'avais pas pensé à cela, puisque mon idée de départ résidait dans le fait que le Xénomorphe était une création issue des expériences des Ingénieurs.
En parlant des Ingénieurs, je trouve qu’il y a là l’un des premiers problèmes du film : la présence de ce « peuple » semble se limiter à une seule ville sur la planète, ce qui me parait peu probable. C’est cela qui permet à David de commettre un génocide qui élimine toute la population.
Les créatures en CGI ne sont pas toujours belles, je préfère largement les effets pratiques. C’est aussi un peu gros de voir que les Néomorphes semblent plus résistants aux balles petits que grands. Il y a des incohérences lors de la naissance du premier Xénomorphe : le processus est beaucoup trop rapide, et on saute carrément l’étape du chestburster. Ce qui n'empêche que ce passage où David contemple son œuvre est tout simplement magnifique.
Dernier souci : le changement d’avis de Ricks et Upworth qui retournent leur veste et décident de suivre Tennessee dans sa décision de secourir ses camarades… au risque de mettre en péril leur mission.
Pour le reste, il s’agit, à l’instar de Prometheus, de critiques souvent injustifiées. Je peux comprendre que des personnes n’apprécient pas la tournure des évènements, que la direction radicale choisi par Ridley Scott ne leur plaise pas. Soit. Mais assumez-le. N’essayez pas de vous cacher derrière les pseudos-arguments de Durendal. Arrêtez de répéter toujours les mêmes bêtises en boucle comme des perroquets.
Je suis le premier à reconnaitre qu’Alien : Covenant a des défauts. Mais cela en fait-il un mauvais film ? Est-ce que des soi-disants incohérences scénaristiques condamnent l’ensemble d’un long-métrage ? L’atmosphère de ce film à elle seule suffirait presque à faire oublier tous les problèmes qu’il peut avoir.
Quant au fait qu’il ne serait pas une prequelle, c’est tout simplement faux car Alien : Covenant est le deuxième volet d’une trilogie qui n’aura probablement jamais de conclusion. En rachetant la 20th Century Fox, Disney a mis un terme au projet de Ridley Scott. Contrairement à ce qui a été dit, ce n’est pas la faute du box-office, car proportionnellement Alien : Covenant a connu un succès similaire à celui de Dune : Première Partie.
Je ne vois malheureusement pas Disney revenir sur sa décision, et ce pour au moins une raison : la recette de la nostalgie fonctionne. La preuve est faite avec Alien : Romulus, le film le moins original de la saga, celui qui recycle le plus ses prédécesseurs et qui pourtant semble (très) apprécié. Le studio ne mettra pas en concurrence la suite d’un film qui correspond à son cahier des charges et un improbable Alien : Awakening réalisé par une personnalité qui divise. Le trou entre Alien : Covenant et Alien, le huitième passager ne sera sans doute jamais comblé, et ça, c'est aussi terrifiant que la fin du film.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes 2017, une année au cinéma, Les films dont on aimerait voir une suite, Les meilleurs films de Ridley Scott, Ma Bible horrifique et Ces scènes mémorables...
Créée
le 13 mai 2017
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