Je vous connais les mecs, vous allez encore rouspéter et râler qu' "On nous fait encore le coup du film tourné "en amateur", encore une énième histoire de pseudo super héros amateur ! C'est pas bientôt fini ? On a vu Chronicle et c'était nul, et puis on a vu Hancock et ça cassait pas trois pattes à un canard". Alors, les mecs, je vous comprends, j'étais comme vous. Mais là, ça vaut le coup.


Déjà, notons le, Stephen Dorff joue vachement bien son rôle de Melvin, quarantenaire white trash paumé qui passe sa vie à s'apitoyer sur son misérable sort, se droguer et picoler, alors qu'il a des super pouvoirs dont il ne se sert que pour mendier, faire des blagues ou braquer des voleurs pour mieux pouvoir continuer à se defoncer encore et toujours, fuyant sans cesse ses responsabilités.
Melvin est souvent détestable, mais il a des potes sympathiques, à commencer par Lucille, un mec charismatique (ouais, je sais, moi aussi j'ignorais que ça pouvait être un prénom masculin) en fauteuil roulant, plein de bagout qui balance autant de vannes que de conseils raisonnables.


Le style documentaire du film se prête ici particulièrement bien à une histoire qui part dans tous les sens (même si parfois, certaines séquences d'action nous amènent à nous demander si l'équipe de tournage ne serait pas aussi suicidaire et auto destructrice que notre anti héros). Ainsi, on ne se trouve pas en face d'un film de genre bien définissable: ce n'est pas une réelle underdog story a la Rocky ou à la 8-Mile (Melvin ne fait pas preuve de beaucoup de volonté de s'en sortir, c'est loin d'être un exemple), ce n'est pas non plus vraiment un film de super héros "réaliste" à la Kick-Ass ou Defendor (Melvin est loin d'être un redresseur de torts), c'est un genre d'ovni un peu batard qui erre entre ces deux genres et qui lorgne parfois du côté de la série anglaise Misfits, notamment pour le ton délibérément cru et le côté cas social de Melvin (et puis un peu aussi parce qu'à l'image des personnages de la série, il écope de travaux d'intérêts généraux. Peut être que le réalisateur Nick Love, détenteur d'un passeport britannique s'est inspiré de ses compatriotes).


Mais c'est justement cet aspect foutraque qui fait la force du film. On ne sait pas où on va, mais on y va avec plaisir. Les effets spéciaux, relativement peu nombreux mais intelligemment utilisés sont tout à fait crédibles et renforcent l'impression de réalisme apportée par le style documentaire, le cadre (les quartiers pauvres de la Nouvelle Orléans) et la justesse du jeu des acteurs principaux.


La fin de l'histoire est un peu abrupte, laissant un sentiment d'inachevé, mais c'est ce que l'on éprouve à la fin de certains "vrais" documentaires, cette envie de demander "que vont devenir ces gens ?" (Qui sait ce que sont devenus les protagonistes de "samedi soir en province" ou des émissions Strip-Tease, je vous le demande) et c'est finalement assez approprié. On regrettera que certains themes ne soient pas suffisamment abordés, on déplorera que le réalisateur n'ait pas souhaité approfondir d'avantage l'aspect "naissance d'un héros" et se soit évertué à écourter au maximum ses quelques scènes d'action (au demeurant bien ficelées et très efficaces) qui n'étaient manifestement pas sa préoccupation première, mais malgré ses petits défauts, American Hero se suit sans déplaisir, et offre une tranche de vie qui sonne juste et sincère, un film original et frais sur un sujet qui, il est vrai, a pourtant été usé jusqu'à la corde ces dernières années.


En attendant la venue du très politiquement incorrect (on l'espère) Deadpool sur nos écrans, ce héros trash devrait vous donner de quoi patienter. Ce n'est pas l'histoire d'un super héros, ni celle d'un vengeur masqué, c'est l'histoire d'un mec qui a de grands pouvoirs et qui a du mal à assumer ses grandes responsabilités.

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le 14 déc. 2015

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