Amours salées et plaisirs sucrés par Maqroll
Les rapports de l’amour (ou du sexe) et de la cuisine sont un grand classique de l’humanité. Ils sont traités ici d’une manière plus qu’originale par un cinéaste dont je ne savais rien avant la vision de ce film et qui en est je crois à son huitième long métrage. Plus précisément, il s’agit d’une variation sur l’amour à trois délicieusement corsée d’exercices culinaires de plus en plus raffinés, qui s’inscrit clairement en référence au Truffaut de Jules et Jim (ainsi qu’à Lubitsch) et de manière plus générique à la culture française en général. C’est aussi un film sur le goût, le goût de la nourriture, le goût de l’amour, le goût de la vie. C’est surtout une œuvre délicatement construite, de la première à la dernière minute (ou d’une naissance à l’autre), avec autant de réflexion et d’imagination que les meilleurs plats, constituant finalement un somptueux repas offert aux spectateurs. La réalisation est nerveuse, rythmée et jubilatoire, le scénario est travaillé avec intelligence et l’interprétation remarquable, où l’on ne peut séparer les trois protagonistes de cette plaisante histoire, Olivia Molina, sensuelle et rayonnante, Paco Léon, mari de plus en plus consentant sans être pour autant trompé et Alfonso Bassave, explosif de charme et d’ambiguïté. La fin est un véritable feu d’artifice et ouvre sur un avenir que l’on se plaît à imaginer dans une « famille » pas du tout conventionnelle (ce qui n’a apparemment pas plu aux moralistes grincheux…) mais acceptant simplement au bout d’un long parcours les plaisirs de la vie. Une petite leçon de vie sans prétention ni complexes, drôle sans être vulgaire, véritable souffle d’air frais sur la comédie espagnole (alourdie depuis quelques années par les derniers produits rances d’Almodovar), à savourer sans retenue !