Son truc à elle, ce sont les odeurs : plus jeune, elle voulait être nez. Finalement, elle a appris le métier de la culture de la terre, et consacre les premières années de sa vie d’adulte aux plantes qu’elle fait pousser dans des cagettes ou sur un petit bout de terre. Des plantes qu’elle bichonne pour en faire des infusions des tisanes qu’elle vendra ici ou là.
Nous sommes en 2012. Anaïs, la petite bretonne, fine comme une crêpe dentelle, a 24 ans et débute dans la vie. Elle habite dans sa caravane, sans électricité ni eau courante, et consacre tout son temps à ses plantes. Elle ne gagne pas d’argent mais elle est heureuse d’être sa propre patronne, plutôt que de travailler en usine.
Dès les premières images, on est séduit par le personnage, on tombe sous le charme de cette fille revêche, de cette jeune femme seule et décidée à mener à bien son projet. Au fil des semaines, des mois, des saisons, elle confie à la caméra de Marion Gervais, à ses amis, à sa famille ou à un chef cuisinier, ses doutes, ses peurs, ses craintes, ses espoirs, mais surtout son envie viscérale d’y arriver.
On retrouve Anais, 10 ans plus tard, en 2022, filmée à nouveau par Marion Gervais, qui lui avait consacré son premier documentaire Anaïs s’en va-t-en guerre (2013), documentaire qui constitue le premier chapitre de ce film. Toujours aussi filiforme, et surtout avec un franc-parler qui na pas changé d’un iota, Anaïs a réussi… Son exploitation s’est agrandie. Elle a désormais sa petite maison, prête à accueillir son amoureux, Seydou, originaire du Sénégal. Malgré les tracasseries administratives, les retrouvailles tant attendues vont pouvoir avoir lieu. Une nouvelle vie à deux va commencer pour Anaïs, avec ses joies et ses peines… surtout ses joies !
C’est un beau et touchant portrait que nous propose là Marion Gervais, celui d’une femme qui a choisi d’être libre, affraichie au maximum des contrains sociales. Comme Sébastien Lifschitz, la réalisatrice colle au plus près de ses personnages pour mieux capter leurs émotions, leurs regards, leurs tourments. Et Anaïs joue parfaitement le jeu. Elle est d’un naturel incroyable, montrant un caractère bien trempé, généreuse et follement amoureuse de son homme au passé douloureux, mais aussi en rage contre les aberrations du système administratif, la bêtise du Monde ou le racisme ambiant.
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