Léon Tolstoï, romancier épique et historique ; Joe Wright, cinéaste surestimé ; Hollywood, maître dans l'art des raccourcis douteux. Trois noms réunis, pour le (presque) meilleur et (surtout) pour le pire.

Tout démarre bien pourtant : Joe Wright veut faire son Baz Lhurmann et joue la carte de la théâtralité assumée et revendiquée. Bien. La méthode se fait lourde, répétitive, inconsistante, pachydermique, nauséabonde. Moins bien. D'autant que Joe Wright ne peut assumer son procédé très longtemps : 10 minutes au début, histoire de bien marteler le truc aux spectateurs, puis retour à un académisme profond tout le reste du film, avec de ci de là quelques piqures de rappel plus douloureuses que bienvenues. Là où un Ken Russell peut faire des prodiges avec ses biopics, Joe Wright s'enlise dans un traitement pénible, lent, se trainant comme les robes d'Anna sur les sentiments d'ennuis des spectateurs.

Le casting ne comprend pas ce qu'il fait là, et nous non plus : Keira Knightley se copie elle-même de films en films, tandis qu'Aaron Johnson doit absolument retrouver le costume de Kick Ass avant qu'il ne soit trop tard. Quant à Jude Law, il s'agit sans doute du figurant le plus prestigieux de l'histoire du cinéma. Qu'importe, c'est un film à Oscars : les costumes sont beaux, les décors sont beaux, la musique est belle, bref tout est beau, tout est dans l'emballage - et on pardonnera bien une surcharge de noeuds sur le paquet cadeau.

Sauf que la cadeau est empoisonné : outre la réduction grotesque et grossière de l'oeuvre de Tolstoï à une histoire d'amour adultère, Anna Karénine enchaîne les séquences creuses, prétextes à quelques beaux effets qui ne servent à rien. Le film est basé sur le principe de la valse : tourner encore et encore, augmenter le rythme jusqu'à l'épuisement sauf qu'il ne s'agit que de tourner en rond, sans autre but que l'ivresse du moment. Anna Karénine se veut l'adaptation ultime du livre de Tolstoï, elle n'est qu'une ombre passagère dans l'histoire des adaptations littéraires.
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le 10 déc. 2012

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