Annette nous donne une nouvelle fois l'occasion de voir le double contraire chez Carax : d'une part une image magnifique digne d'un grand plasticien, de l'autre une narration très pauvre, digne d'un apprenti cinéaste.
Carax une fois de plus nous emmène dans une suite de tableaux superbes. Un peu comme dans Holly Motors et d'autres films plus anciens, on sent une production très rutilante, on voit des acteurs stars qui évoluent dans des décors et effets somptueux, une image très travaillée, héritière des Beineix ou certains Besson, parfois très art contemporain. Certaines séquences à elles seules pourraient figurer en installations vidéo immersives en boucle dans des musées d'art contemporain. On reconnait ce goût pour un kitsch sur-sophistiqué, qui par endroits nous rappelle des fabrications à la Fellini (Et vogue le navire dans la scène du bateau).... Bref c'est du très grand au niveau de l'image.
Le problème reste que rien ne tient dans la narration. On comprend vite qu'on entre dans un processus vicié et que ça ira jusqu'au bout. Il n'y a pas de dramaturgie, pas de suspense, pas de beauté d'une intrigue. Histoire pauvre, musique des Sparks qui joue le cliché de la comédie musicale mais sans le mérite d'être motivé par l'histoire. Bref le navire prend l'eau dès le début et ne vogue jamais. Les vagues en plastique n'ont aucun moteur sacré de narration.
Pour synthèse je retiendrai cette séquence du début du film où Carax se plait à faire le directeur de studio musical rock; il se plait à se mettre en jeu en homme fermé aux lunettes noires / cliché du rocker sur-revu. C'est bien cela : on sent un film de technicien de l'image mais qui n'a pas grand chose à raconter, pas grand coeur. C'était déjà la même chanson sur les Amants du Pont Neuf. Rien ne s'est amélioré depuis. Sauf peut-être la production. Et les récompenses. Non, Annette n'est vraiment pas un bon film.