Moins esthétisant que Je la connaissais bien, moins visuel que Adua et ses compagnes, La visita (synthèse parfaite de ces deux films par sa thématique) garde toutefois des œuvres principales de Pietrangeli, outre des dialogues soignés filmés sans la lourdeur du champ contre champ, la subtilité d'écriture et la qualité d'un scénario peignant le portrait sans fard des vices et vertus de l'homme et de la femme dans le commerce de l'amour.

Même s'il prend son temps pour se mettre en place, le scénario, écrit d'après une nouvelle de Carlo Cassola, se déploie progressivement, au fur et à mesure que les personnages se dévoilent et, sans apprêts, révèlent leur vrai personnalité, avant de proposer la peinture d'une certaine Italie moderne dans la région libérale de l'Emilia-Romagna où, malgré le poids incontestable de la tradition, ont le droit de cité des mœurs nouvelles. Nouvelles, en effet, car, en se servant de cet ancêtre des sites de rencontres et autres applications d'amours éphémères qu'étaient les petites annonces matrimoniales et sérieuses publiées dans les journaux d'alors, la visita introduit une forme surprenante pour l'époque de réunir des êtres que la distance sépare mais qu'un improbable destin réunit. Tour à tour pointés du doigt puis excusés par le regard minutieux et acide du Pietrangeli, homme et femme sont mis à nu dans leur plus secret travers et, au moyen d'un resserrement en une journée du récit, ils viennent représenter les relations maritales d'un temps où se formaient des couples se méconnaissant et apprenant à se détester et à s'aimer.

Un film étonnamment moderne qui vaut le détour, ne serait-ce que pour les lèvres et les courbes de la sensuelle Sandra Milo (et la merveilleuse scène de la balançoire).

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