Trop c'est trop
Ayant vu le film à l'époque en avant-première, je me contenterai de dire que c'est une oeuvre démente: le fruit d'un esprit malade et dérangé en dépit de certains passages assez beaux noyés hélas...
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Lars von Trier revient avec le goût prononcé pour la provocation qu'on lui connaît. Antichrist est un film bouleversant que ce soit par son esthétisme ou par les libertés prises par le réalisateur. On hésite à s'extasier devant la beauté de ces images, tant certaines scènes sont explicites et violentes. À mesure qu'on avance dans l'histoire, l'hommage rendu à Tarkovski devient évident, et la rencontre entre le russe et le danois élève le film au rang de chef-d’œuvre.
Au pied du Mur
La scène d'exposition est brillante. Ce somptueux noir et blanc couplé au ralenti et à cette musique transcendante nous font d’emblée entrer dans l’ambiance du film, tout en posant la base de ce qui conduira le couple à sa perte : le deuil de leur enfant. On plonge petit à petit dans une atmosphère sombre et dérangeante. Charlotte Gainsbourg, dépressive, nous communique sans concession ses atroces crises d'angoisses admirablement interprétées. À l'image de Kristen Dunst dans Melancholia, on retrouve le personnage au pied du mur, ébranlé par une tragédie qui semble insurmontable. L'état psychologique de Elle (Gainsbourg) est sans cesse analysé, presque quantifié, par son mari psychiatre, interprété par Willem Dafoe. Cela a pour effet de rationaliser la démence qui gagne peu à peu le couple, élevant cette maladie au rang de seule instance capable de, désormais, guider le film.
Que dirait Freud ?
Tout cela n'est qu'un vaste questionnement méta-physique : l'homme est il fondamentalement bon ? Quelle est sa nature profonde ? Von Trier opère une dichotomie entre nature et intellect. Elle a tendance à adopter un comportement primaire. Elle se perd dans l’irrationnel en se laissant dominer par ses pulsions, sans manifester à quelque moment que ce soit la volonté de les réprimer. La nature se trouve ici rapprochée du satanisme, car elle est cruelle et animale. On nous fait entrevoir ces aspects via les scènes portant à l'image des mécanismes de la vie sauvage : les fourmis mangeant l'oiseau mort, les sangsues que Lui retrouve sur sa main, ou encore la biche qui enfante. Le personnage de Elle bénéficie de riches références : Baudelaire disait « La femme est abominable parce qu'elle est naturelle ». Il semble clair que c'est là que se trouvent les bases qui guident l'évolution de Charlotte Gainsbourg vers la folie la plus profonde.
Lui, au contraire, cherche à tout intellectualiser. Il s'oppose à Elle par sa raison. Seulement la victoire de sa femme sur lui pose une morale cruelle mais lucide : notre part animale est bien plus puissante que toutes les autres instances qui interviennent dans notre psychisme.
À trop chercher la rationalité on se fait dominer par la Nature qui nous rattrape.
Si le film a été largement critiqué pour son extrême violence, il semble clair que les scènes de sexe explicites et de violence crues viennent enrichir ce propos. Antichrist est une réflexion sur la condition humaine et son fonctionnement, et pour être apprécié il doit être considéré et vu comme tel.
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Créée
le 24 mars 2016
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