Fourmiz

C'est un peu léger pour un Prix du meilleur réalisateur. Si la mise en scène est fonctionnelle, elle est d'une effroyable banalité. Les plans pourraient être ceux de n'importe quelle vidéo « time-lapse » sur YouTube, quoique qu'une caméra GoPro aurait offert une image de meilleure qualité. Pour un métrage de cette durée, il aurait quand même pu être intéressant de dynamiser davantage le montage ou de rendre la mise en scène plus inventive. Les plans ne font que se succéder de manière aléatoire sans logique apparente, sans que cela ne semble signifier quoi que ce soit. L'idée de la comparaison entre les humains et les fourmis sur le plan de l'organisation sociétale n'est pas mauvaise, mais faire défiler des plans qui, mis bout à bout, ne montrent rien et servent uniquement de tremplin vers la chute n'est en rien gage de maîtrise technique.

Le pire arrive à la fin, lorsque la chute surgit avec ses énormes sabots, venant couper l'élan que le métrage avait eu du mal à mettre en place. Malheureusement, ce genre de chute du type « message de prévention avec des images qui attirent l'œil puis un message informatif moralisateur » est rédhibitoire. Ce n'est pas subtil, ce n'est pas efficace, ce n'est pas intéressant et ce n'est pas du cinéma... au mieux c'est une campagne de sensibilisation financée par Nicolas Hulot, au pire c'est une vulgaire propagande idéologique menée par des moralisateurs ayant fait du signalement de vertu leur sport de prédilection. Ce final est vraiment balourd et c'est dommage, on aurait pu faire quelque chose de plus pertinent avec l'idée de base mais c'est beaucoup trop forcé pour faire passer un message qui puisse être entendu. Le parallèle entre les Hommes et les fourmis, bien que réchauffé, est une idée sympathique qui se fait regrettablement balayer en même temps que les insectes quand la déferlante d'eau sonne le glas final. Et ce petit sermon trop alambiqué en dépit de sa facilité « les humains sont responsables de la disparition des espèces et sont même l'instrument de leur propre perte puisque les fourmis représentant les Hommes sont tuées par l'eau d'une bouteille en plastique jeté par l'Homme » témoigne du manque d'approfondissement de nos cinéastes amateurs.

On sait parfaitement que l'Homme est en train de tout bousiller, tout le monde le sait, beaucoup sont dans le déni mais c'est un fait inconsciemment notoire et universel. On voit bien qu'ils ne sont pas allés cherchés bien loin pour pondre leur métrage. Il serait temps de dépasser le stade où l'on fait culpabiliser le spectateur avec des faits acquis par tous, et qui, comble de la chose, concernent absolument tout le monde, ce qui rend l'exercice de pointage du doigt complètement impertinent et irrationnel. On apprécierait davantage une œuvre qui puisse aller un peu plus loin. Une œuvre qui pourrait nous montrer des pistes, qui pourrait faire preuve d'inventivité dans sa forme. Quelque chose qui ne ce contente pas seulement de mettre le doigt et crier au scandale sur un problème qui est à la vue de tous quotidiennement. Ce n'est pas comme si les média ne nous rabâchaient pas les oreilles avec la problématique écologique et ses chiffres alarmistes depuis plusieurs années. Il serait grand temps de passer au stade supérieur du processus de création.