Un essai est louable et par moment beau, mais dans l’ensemble, on en sort déçu.
Arang est un film étrange. Pas mauvais, pas excellent non plus, mais étrange oui, il laisse un sentiment d’inachevé, ou du moins, de gâchis, probablement pour des raisons commerciales. Sortant en 2006, soit 8 ans après le début de la vague de films de fantômes initiés par Ring en 1998, Arang fait parti de ces petits films qui tentent d’apporter un peu de sang neuf à un genre épuisé jusqu’à la moelle. Et pour se faire, l’horreur et le fantôme ne suffisent plus. D’après mes recherches, Arang s’inspirerait d’une légende, et le film va la transposer de nos jours pour en tirer un thriller, un des genres de prédilection (avec les comédies) de la Corée du Sud. Arang, bien qu’il traite bel et bien d’un fantôme aux cheveux longs et noirs (deux même on pourra dire) prend donc la structure narrative d’un thriller, avec deux flics, une enquête, des rebondissements, des interrogatoires. Le gros souci, c’est que les deux parties, la partie classique du fantôme qui tue, et la partie thriller, ne se marient pas toujours très bien, et deviennent même incohérentes mises ensembles. Un comble donc. Pourtant, et ce dès le début, il y a beaucoup de bonnes choses dans Arang. En premier lieu, Ahn Sang-Hoon livre sa première réalisation, et on peut le dire, il fait du plutôt bon boulot. Le visuel est travaillé, les éclairages jolis, les plans bien trouvés. Quand il s’attaque à l’horreur pure malheureusement, on sent bien que beaucoup sont déjà passés avant lui, et on a souvent une impression de déjà vu.
Quelques belles apparitions sont à noter tout de même, et il nous arrive de sursauter par moment, mais c’est probablement plus à cause des tics du genre, en terme de mise en scène, et bien entendu, d’effets sonores. Malgré quelques bons moments, la partie horrifique du métrage se fait donc assez décevante. La partie thriller se montre par contre immédiatement beaucoup plus sérieuse, et il faut dire que les deux acteurs principaux sont plutôt convaincants pour nous y faire croire. Cette partie, pourtant classique en tant que telle, a le don d’apporter un peu de neuf au genre horrifique tant prévisible de nos jours. L’intrigue se suit plutôt bien, les rebondissements sont nombreux, et le réalisateur n’hésite pas à développer certains aspects de ses personnages pour leur donner un peu plus de consistance, et cela fait franchement plaisir à voir. De plus, voir des policiers dans un film de fantôme plutôt que les futures victimes ou des journalistes a le don de changer, et donc, de plaire. Un déséquilibre certain se forme alors entre les deux genres principaux du métrage, déséquilibre qui va s’accentuer au fur et à mesure des scènes, et qui trouvera alors dans sa dernière demi-heure à la fois sa plus grande force, et sa plus grande faiblesse.
Une fois que l’intrigue est donc suffisamment évoluée, et que les personnages sont bien définis et que l’on a eu le temps de s’intéresser à eux, le réalisateur, également coscénariste, va tenter de rationnaliser son propos. D’un côté, cela nous donnera des scènes magnifiques (comme la scène du flashback) mais également un instant d’une rare poésie dans les derniers instants, venant justifier certains éléments. Mais de l’autre côté, cette rationalisation de l’histoire et des événements vient contredire ce qui précédait et apporter une grosse incohérence au métrage. Du début à la fin, le réalisateur aura tenté de faire de gros efforts pour se distinguer et livrer des moments magnifiques, mais en restant trop ancré dans un cahier de charge, celui du fantôme à cheveux longs, il détruit également son métrage en le rendant parfois incohérent, et trop classique dans ses apparitions, même si certaines fonctionnent. Gros paradoxe donc. Pour ces efforts et le sérieux de sa mise en scène, ainsi que des moments terre-à-terre fort réussis, Arang vaut le détour. Mais à côté, le reste peut énerver le spectateur, dommage.