Pas mal, bien qu'un peu de bric et de broc

L'intérêt pour l'histoire a été, en ce qui me concerne, lent à naître.
Disons d'emblée que le rôle d'Ava, ado de treize ans, est jouée par une actrice qui en paraît plus (et qui en a effectivement dix-huit), et que ça biaise un peu les choses durant tout le film, notamment ses relations avec le garçon dont elle va s'éprendre (mais aussi la compréhension de son comportement vis à vis de celui-ci, par ex. soulever son tee-shirt pour montrer au garçon ses seins nus se comprend différemment si c'est le fait d'une ado de treize ans ou d'une jeune fille de dix-huit).
Mais reprenons au début... Ava, sa mère et son petit frère (un bébé de 15 mois environ) sont en vacances d'été sur la côte atlantique (landaise ?). Suite à des malaises oculaires répétés et une visite chez le médecin, elle apprend qu'elle va perdre la vue, d'abord seulement en vision nocturne (c'est en cours), mais qu'à terme et assez vite, elle va devenir totalement aveugle. Rentrant de cette visite, sa mère en séchant ses larmes lui dit quelque chose comme : "C'est épouvantable, mais ma fille, faut qu'on profite de nos quinze jours de vacances à fond... tant que t'y vois encore !"
À la plage, Ava remarque et s'intéresse à un grand chien noir plus ou moins errant, qui s'avère avoir pour maître un jeune et beau gitan, dont on apprendra, par bribes, qu'il est en rupture de ban avec son clan. On pige tout de suite qu'Ava va craquer pour ce beau brun, mais... ça traîne, on a à s'appuyer toute la première partie du film faite d'une succession de scènes modérément intéressantes. Ava ne s'entend pas trop avec sa mère qui, semblant oublier complètement que sa fille va devenir aveugle à plus ou moins brève échéance, préfère (au lieu d'aller consulter, par ex., un autre spécialiste des yeux) s'envoyer en l'air avec un vendeur ambulant black rencontré à la plage.
Cette mésentente mère-fille va rapprocher Ava de Juan, le beau gitan solitaire qui s'est provisoirement réfugié dans un vieux blockhaus cassé et abandonné à l'extrémité de la plage qu'elle fréquente. Ce qui est assez bien traité dans le film , c'est la naissance d'une sorte d'amour entre Ava et Juan. Ils sont beaux tous les deux, jeunes, sauvages (mais elle, en théorie, n'a que treize ans et jamais eu de petit copain, lui est un jeune adulte de 18-20 ans). L'intimité de leurs corps est photographiée avec un mélange d'audace et de pudeur rarement vues sur nos écrans. Bref, petit à petit, on est accroché par l'histoire, on espère qu'Ava ne sera pas déçue, que Juan répondra à son amour.
Les péripéties, diverses, variées et "surréalistes" se bousculent dans la deuxième moitié du métrage, avec tout un passage directement inspiré de Pierrot le fou. Cependant, les vingt dernières minutes (qui tournent autour d'un mariage gitan) nous sortent, dieu merci, de ce mélange de plagiat et d'accès d'onirisme, et collent davantage à une certaine réalité, même si de cinéma.
Quand défile le générique de fin, on se dit qu'Ava connaîtra quand même une belle histoire d'amour, avant de perdre, si cela se vérifie, totalement la vue. En fait, on n'est pas vraiment inquiet pour elle, on a trop conscience qu'on nous a raconté une "jolie histoire" dont le but était de nous distraire un moment.
En résumé, scénario bancal (première partie beaucoup trop longue), bourré d'invraisemblances et assez dispersé, mais casting du jeune couple réussi (malgré l'âge réel de Noée Abita) et prémices d'une histoire d'amour assez bien traitées et qui captivent notre intérêt : l'alchimie entre Abita et Juan Cano fonctionne bien et ça sauve le film.