Fate/hollow ataraxia
Avant que nous disparaissions, j’ai quelque chose à te confier. Moi aussi, il y a certains concepts que je n’ai jamais maîtrisés, que j’aurais voulu voler à d’autres. Juste par curiosité, pour...
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Étrange, cet échec. Le film de Kiyoshi Kurosawa n’est pas dépourvu de qualités : son traitement anti-spectaculaire de l’apocalypse, l’importance accordée à la psychologie des personnages – en particulier l’effet miroir des humains et non-humains – et quelques très jolis plans et scènes marquantes… Mais l’ensemble souffre d’une série d’incohérences difficiles à ignorer.
L’usage des citations de genre en est sans doute le meilleur exemple. Quand le film commence, il oscille entre les codes du slaher et ceux de la comédie horrifique (voir le plan final du camion qui déraille sur la route et le sourire qui l’illustre…). L’horreur reste un peu présente, avec quelques plans basés sur un hors cadre menaçant ou sur l’étrangeté parfois poisseuse des extraterrestres… avant de disparaître complètement dans le flot du film. Kiyoshi Kurosawa privilégie ensuite le drame familial, le questionnement autour de l’humanité des personnages… et finalement, dans le dernier tiers, les codes de l’action – fusillades, explosions – de la science-fiction et du récit post-apocalyptique…
Mélanger les genres est un exercice périlleux et ici, à part le principe de la citation, c’est autour du thème du décalage que le réalisateur essaye d’articuler ces différentes inspirations. Le monde décrit dans Avant que nous disparaissions à quelque chose de factice, d’artificiel. Tous les personnages, à part Narumi et Sakurai qui servent le processus d’identification, agissent en décalage et à contretemps. Les phénomènes paranormaux laissent les passants indifférents, les services secrets et l’armée traversent toujours les scènes comme s’ils ne disposaient d’aucun esprit stratégique et alors qu’ils sont effectivement informés…
Le sentiment d’étrangeté qui découle de ce choix scénaristique est malheureusement déforcé par la réalisation très lente, silencieuse et contemplative. L’ironie dramatique se retourne contre le film ; le spectateur assistant à l’avancé des différentes intrigues – celles des humains et des extraterrestres – a toujours deux pas d’avance sur les protagonistes… que le réalisateur s’ingénie à ralentir le plus possible. Et malheureusement, le périple se conclut sur une morale humaniste mille fois vue ou lue – de toutes les émotions, c’est l’amour qui est fondamental.
Le décalage est aussi dans le jeu des acteurs. Masami Nagasawa (Narumi) surjoue souvent l’énervement, Hiroki Hasegawa (Sakurai) une désinvolture en contradiction avec son engagement de plus en plus fort vis-à-vis de son rôle de guide et les extraterrestres tombent dans les deux extrêmes : cabotinage ou inexpressivité… Difficile, du coup, de prendre le film comme un tout, une expérience totale. Son rythme et le décalage nuisent à la suspension de crédulité du spectateur et, inversement, son réalisme et son focus psychologique empêchent de basculer dans la contemplation et la fascination.
Kiyoshi Kurosawa trouva sans doute un public pour son long-métrage ; mais il ne sera pas suffisant pour le faire ressortir dans la filmographie du réalisateur ou dans le genre, déjà bien chargé, de la parabole humaine sur fond d’apocalypse. Étrange donc, cet échec.
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